Le tourisme en Afghanistan depuis le retour au pouvoir des talibans

En Afghanistan, le tourisme a fait un bond depuis que les talibans ont pris le pouvoir en aout 2021. Un tourisme qui reste à haut risque dans le pays, comme l’a montré la récente attaque qui a tué trois touristes espagnols et trois Afghans à Bamiyan dans le centre du pays. Une attaque ciblée revendiquée par le groupe État islamique. Éclairages

Un soldat taliban monte la garde devant les ruines d'une statue de Bouddha vieille de 1 500 ans à Bamyan, en Afghanistan, le 2 mars 2023. REUTERS - Ali Khara

De notre correspondante dans la région, 

Un groupe de 13 touristes se trouvait devant le marché de Bamyan lorsqu’un ou plusieurs assaillants a ouvert le feu sur les touristes étrangers et leurs accompagnateurs afghans. Cette attaque a été revendiquée par le groupe État Islamique. Les autorités talibanes ont déclaré avoir arrêté sept suspects. On n’en sait pas plus pour l’instant. Mais cette attaque a créé la stupeur.

Bamyan est une région montagneuse du centre de l’Afghanistan, berceau des hazara, une communauté en majorité chiite. C’est aussi là que se trouvent les bouddhas géants de Bamyan qui ont été dynamités par les talibans en 2001.

Bamyan est connu pour être un havre de paix, un bijou de beauté et de sites archéologiques ancien avec un lac d’eau turquoise d’une beauté époustouflante. C’est le lieu touristique par définition en Afghanistan.

Il l’a toujours été, même sous l’ancienne république d’Afghanistan, avant l’arrivée des talibans. Et des touristes s’y rendaient déjà à l’époque, malgré l’insécurité liée à la criminalité, au groupe État islamique, et puis surtout à la guerre civile qui opposait le gouvernement appuyé par la coalition internationale aux talibans.

Que représente le tourisme en Afghanistan depuis l’arrivée au pouvoir des talibans ?

Le tourisme a explosé, on peut dire. Plus de 5 000 étrangers ont visité l’Afghanistan l’année dernière. Ces chiffres sont donnés par les talibans.

Le tourisme domestique a aussi explosé. On a vu sur place, par exemple à Herat dans l’ouest, des touristes qui venaient du Helmand et de Kandahar qui sont les provinces bastions des talibans dans le sud du pays.

Mais aussi des touristes afghans dans la province du Nouristan, dans la Badakhsan, des zones qui étaient très peu fréquentées à cause de la guerre, parce que les routes étaient des coupes gorges et parsemées de mines antipersonnelles.

C’est une vraie révolution touristique qui se produit en Afghanistan depuis que les talibans ont pris le pouvoir et cela est encouragé par l’administration du régime qui y voit, bien sûr, une opportunité économique.

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Mais l’insécurité est persistante en Afghanistan, il ne faut pas l’ignorer. Faire du tourisme en pays taliban aujourd’hui n’est pas sans risque. Car il y a des groupes armés qui sévissent dans le pays comme le groupe État islamique, mais il y a aussi d’autres groupes terroristes, comme les talibans pakistanais également.

Quel impact risque d’avoir l’attaque du 19 mai sur le tourisme en Afghanistan ?

Le tourisme étranger va prendre un coup, c’est ce que tout le monde prédit. Il suffit de regarder les réactions des touristes qui se trouvaient sur place au même moment, ou qui avait pour projet de se rendre en Afghanistan prochainement.

La guide touristique d’un groupe de touristes britanniques qui est arrivé à Bamyan le lendemain de l’attaque expliquait que les touristes étaient très nerveux, très inquiets ; ils disaient tous que s’ils ne se trouvaient pas déjà dans le pays, ils auraient annulé leur voyage.

Cette guide touristique disait elle-même être inquiète parce que le comportement des autorités talibanes sur place était extrêmement stressant. Ils avaient imposé plus de restrictions sur les déplacements, sur les visites possibles.

Et puis elle a expliqué avoir été surprise de constater que le ministère du Tourisme délivrait sans aucune difficulté les autorisations alors que les services de renseignements talibans imposaient des restrictions, contrôlaient en permanence, menaient la vie difficile aux agences de tourisme, montrant qu’ils étaient bien embêtés de devoir gérer cette situation et ce n’est pas la première fois que l’on voit ce genre de dissensions entre le gouvernement et les services de sécurité.

Les agences de tourisme en pays dangereux reconnaissent aussi que cette attaque va porter un coup au tourisme étranger en Afghanistan, parce que cela pose bien évidemment la question de la sécurité qui n’est pas garantie même sous le régime taliban.