Bangladesh: après l'exil de Sheikh Hasina, à quelles suites s'attendre?
Publié le :
Au Bangladesh, voilà un peu plus d’une semaine qu’un large mouvement étudiant rejoint par d’autres couches de la population a renversé Sheikh Hasina. La Première ministre, « la bégum de fer », qui a régné pendant 15 ans sur le pays, a dû fuir en Inde. Un nouveau gouvernement intérimaire s’est installé avec à sa tête le prix Nobel de la paix Muhammad Yunus. La situation sécuritaire s’améliore, mais semble encore instable tandis que les pouvoirs publics restent grandement absents.

De notre envoyé spécial à Dhaka,
► Quelle est l’ambiance dans la capitale, un peu plus d’une semaine après la chute du gouvernement de Sheikh Hasina ?
Dans la ville, il flotte toujours un parfum post-révolution assez sympathique. Avec les étudiants, toujours en charge de la circulation ou en train de peindre des slogans sur les murs. À l’image des deux membres du mouvement étudiant nommés au gouvernement, ils prennent une place très importante. Accompagnés des militaires, ils veillent devant les endroits importants, les résidences des alliés de Hasina détruites, ou encore l’ex-palais de la Première ministre. Ce sont eux, encore, qui ont exigé et obtenu la démission du président de la Cour suprême.
► Les attaques contre les minorités et violences contre des maisons ont généré beaucoup de tensions. La situation sécuritaire s’est-elle améliorée ?
Oui, clairement. La plupart des meurtres, des agressions, des maisons qui ont été brûlées ont eu lieu en début de semaine dernière. Des attaques notamment liées au désir de vengeance d’une partie de la population après quinze années pendant lesquelles la ligue Awami était au pouvoir. Nous avons pu visiter une rue de Dacca, où toutes les maisons de personnes que les manifestants considéraient proches de Sheikh Hasina ont été brûlées. Concernant les violences contre les Hindous, c’est un problème historique, et on sent une tension très forte sur le sujet : des manifestations quotidiennes, des personnes qui protègent les temples, hindous comme musulmans. Il y a aussi beaucoup de désinformation, notamment venant des ultra-nationalistes indiens accusant les musulmans radicaux avec beaucoup de fausses informations. Ce que l’on sait, c'est que trois personnes sont mortes et entre 7 et 25 temples ont été vandalisés. Le gouvernement intérimaire assure prendre le sujet très au sérieux.
► Pas de date pour les élections ?
Toujours pas, mais c’est aussi parce que c’est un enjeu principal pour l’avenir du pays. S'il y a un vote dans les prochaines semaines, le Parti national du Bangladesh, le BNP l’emporterait avec un raz de marée. Le parti de la Première ministre, la Ligue Awami est en lambeau, mais compte certainement se présenter. L’autre force politique importante, Jamaat-el-Islami est interdite. On pourrait donc attendre plusieurs mois, car le défi pour Muhammad Yunus c’est de créer les conditions d’une élection sereine, d’une compétition équitable. Et il se murmure que les figures étudiantes, dont deux sont dans le gouvernement intérimaire, pourraient surfer sur la vague révolutionnaire et se frotter aussi au verdict des urnes…
À lire aussiBangladesh: une semaine après la chute de Sheikh Hasina, les leaders étudiants reviennent sur la révolte
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne