Étoiles d'Orient

Reinette l’Oranaise, la reine de la chanson judéo-arabe

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Le nom de scène de Sultana Daoud, la plus célèbre des chanteuses aveugles, lui vient de Saoud l’Oranais, maître de la chanson arabo-andalouse, qui la forma à la musique. Cette autrice compositrice et oudiste virtuose, qui connaîtra la gloire, l’oubli pendant la Guerre d’Algérie, puis de nouveau la gloire, en France où elle s’était installée, est l’une des plus immenses représentantes du haouzi et du folklore musical oranais. Elle en sauva des dizaines de morceaux de l’oubli, après les avoir patiemment transcrits en braille afin de les mémoriser.

Reinette l'Oranaise à droite, Saoud l'Oranais et une danseuse.
Reinette l'Oranaise à droite, Saoud l'Oranais et une danseuse. © Collection privée HH
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Née en Algérie en 1915, Reinette l’Oranaise est un mystère. Un trait d’union entre juifs et musulmans, effacée par l’Histoire. La preuve d’une présence, celle des juifs d’Algérie sur une terre dont la très grande majorité d’entre eux se sont maintenant exilés.

Alors que les livres, les films et les séries télévisées abondent sur des chanteuses telles que Oum Kalthoum, Asmahan ou Dalida, il y a très peu de documents sur Reinette l’Oranaise, exception faite de deux films magnifiques, Amours éternelles (1987) et Reinette l’Oranaise, le port des amours (1992), tous deux réalisés par Jacqueline Messaouda Gozland, et de quelques entretiens radiophoniques réalisés eux aussi du vivant de la chanteuse. Comment expliquer le silence qui règne autour de cette artiste immense ?

D’abord, c’est une femme qui chante et joue de la musique dans une société et une époque extrêmement patriarcale, où le seul espace de liberté des femmes se cantonne généralement à la cuisine où ne pénètrent pas les hommes. Elle est aveugle, toujours chaussée de lunettes noires, ce qui ne colle pas particulièrement avec l’image classique des chanteuses. D’autre part, elle est juive. Reinette l’Oranaise a vu le jour dans une famille sépharade. Sa communauté ne sera ni épargnée par la Seconde Guerre mondiale ni par la Guerre pour l’Indépendance de l’Algérie.  

Reinette l’Oranaise avait son émission de musique hebdomadaire sur Radio Alger, collaborait avec les plus grands musiciens de son temps, toutes confessions religieuses confondues. Mais doit, comme plus de 100 000 membres de sa communauté au milieu du XXè siècle, elle doit s’exiler. Un exil qui entrava sa carrière pendant plusieurs dizaines d’années.

Et pourtant, au soir de sa vie, grâce à deux admirateurs, Reinette l’Oranaise reviendra sur le devant de la scène jusqu’à se produire, en 1989, dans la mythique salle de l’Olympia de Paris.

Avec Jacqueline Messaouda Gozland, réalisatrice, autrice du film Reinette l’Oranaise, Le port des amours, dédié à Reinette l’Oranaise, Sapho et Marianne Zaoui, nièce de Reinette l’Oranaise.

Jacqueline Gozland.
Jacqueline Gozland. © Marjorie Bertin

Pour aller plus loin :

  • Reinette l’Oranaise, Le port des amours, film documentaire réalisé par Jacqueline Messaouda Gozland
  • Amours éternelles, film documentaire centré sur la relation de Reinette l’Oranaise avec son pianiste Mustapha Skandrani, réalisé par Jacqueline Messaouda Gozland.
Marianne Zaoui.
Marianne Zaoui. © Michèle Zaoui

Programmation musicale :

Reinette l’Oranaise, Mazel haï Mazel

Reinette l’Oranaise Ya biadi ya nass (Ô que je suis heureuse)

Reinette l’Oranaise, Aadrouni ya Sadate  

Nechkar El Karim (Chant de louange)

Reinette l’Oranaise, Nhabek Nhabek (Je t’aime, Je t’aime)

- Reinette l’Oranaise, Qum Tara (Lève-toi et admire)  

Sapho, Qum Tara (Lève-toi et admire) live.

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