Les prochaines élections italiennes peuvent-elles entraîner une crise de la dette?
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En Italie, les derniers sondages donnent tous l’extrême droite gagnante aux élections législatives de ce dimanche 25 septembre. Cette perspective alimente les tensions sur le marché de la dette. La péninsule, et toute la zone euro avec, peut-elle basculer dans une nouvelle crise de la dette ?

L'Italie demeure le deuxième pays le plus endetté de la zone euro, après la Grèce, et elle sera sans doute soumise à de fortes turbulences sur le marché de la dette si Giorgia Meloni, la cheffe de Fratelli d'Italia, succède à Mario Draghi. L’ancien président de la BCE avait la légitimité pour rassurer les marchés. Fratelli d'Italia, ou Frères d'Italie, aujourd'hui en tête des sondages, au contraire inquiète : c'est un parti post fasciste avec un ADN anti européen. La dette italienne représente aujourd'hui 150% de son PIB. C'est bien plus qu'en 2010, lors de la dernière crise de la dette qui a fait tanguer la zone euro. Et le taux d’emprunt à dix ans de l'État italien s'envole, il a atteint hier 4,2%. L’écart avec le taux allemand pourrait très vite se creuser et entrer dans la zone critique des 250 points. Un seuil considéré comme explosif. A priori il y a donc un vrai danger pour l’ensemble de la zone euro.
Mais il y a aussi des différences notoires avec 2010
D'abord, la BCE dispose d'un nouvel outil pour soutenir un pays spécifique. Ensuite, l'économie italienne est aujourd'hui en bien meilleure forme. C'est le pays de la zone euro qui a connu la meilleure croissance au deuxième trimestre. Il est beaucoup plus solide qu'il y a douze ans pour résister à une crise de la dette. C’est la conviction de l’économiste Julien Marcilly de GSA. Il souligne que les entreprises italiennes, petites et grandes, ont pris l’habitude de s’autofinancer plutôt que d’emprunter auprès des banques, ces dernières sont donc moins exposées au risque de faillite. Autre signe rassurant : les banques sont bien capitalisées. Avec une nuance : elles détiennent toujours une portion importante de dette italienne, elles seront donc fragilisées en cas de crise. Ensuite le rebond de l’économie est fragile ; la crise énergétique détériore sa balance extérieure, et la productivité des entreprises pourrait souffrir à moyen terme des tensions sur le marché du travail.
Le discours très patriotique de Giorgia Meloni est-il compatible avec l’agenda européen?
Son discours électoraliste est très patriotique et très populiste. En s’alliant avec Forza Italia de Silvio Berlusconi et la ligue du Nord de Matteo Salvini, le parti post fasciste prône la baisse drastique des impôts avec un taux commun à tous les ménages, et fait beaucoup de promesses de nouvelles dépenses pour aider les retraités ou les habitants des régions déshéritées du Sud. Sans présenter les mesures précises pour les financer, il y a de quoi faire très vite déraper le déficit budgétaire. D'autant plus que les dépenses courantes font déjà exploser les besoins de financement. Voilà de quoi attiser les braises d’une crise de la dette. L’Italie est l’un des principaux bénéficiaires du plan de relance post-Covid : 200 milliards d’euros lui ont été alloués. Or les versements pourraient être suspendus si le gouvernement sorti des urnes ne réalise pas les réformes demandées.
La favorite des sondages prendra ce risque?
Ce n’est pas dans l’intérêt de son pays, et ce n'est sans doute pas ce que souhaitent les Italiens; même s’ils s’apprêtent à donner une majorité à un parti anti-européen, les Italiens sont majoritairement très attachés à l’euro et à ses institutions, d’après tous les sondages. Loin de vouloir croiser le fer avec Bruxelles, Giorgia Meloni cherche au contraire à rassurer en multipliant les fuites dans la presse sur ses échanges réguliers avec Mario Draghi. L'actuel titulaire du ministère des Finances pourrait même rester à son poste. Il a démenti mais la rumeur a tranquillisé les milieux d'affaires. Au lendemain du scrutin, l’attribution de ce portefeuille stratégique sera le véritable test sur ses intentions.
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