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France, Venezuela, Ukraine: comment les marchés financiers anticipent la géopolitique?

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Les investisseurs n’aiment pas l’incertitude. Quitte à paraître contre-intuitifs, ils préfèrent une décision claire, même coûteuse, à une attente floue. Deux exemples récents - la France et le Venezuela - montrent comment les marchés anticipent l’avenir plutôt qu’ils ne réagissent au présent.

Image RFI Data / Global finance concept. Financial data with globe in foreground. Globe shows Europe
Les marchés défient souvent le bon sens et anticipent parfois les décisions géopolitiques mondiales. © Courtneyk / Getty Images
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C’est un paradoxe qui en dit long sur la logique des marchés financiers. Ce mardi 14 octobre 2025, le Premier ministre français Sébastien Lecornu a annoncé la suspension de la réforme des retraites, une mesure qui devrait pourtant alourdir encore le déficit français. Et pourtant, les marchés ont salué cette annonce. Pourquoi ? Parce qu’en agissant ainsi, l’exécutif a pris une décision claire, offrant une forme de cap politique. Or, ce que détestent plus que tout les investisseurs, c’est l’incertitude. Concrètement, les marchés financiers cherchent avant tout de la visibilité.

Depuis la dissolution de 2024, le climat politique français restait flou. La suspension de la réforme a donc été interprétée comme un signal de stabilité, même temporaire. Mieux vaut un cap coûteux qu’une incertitude prolongée.

Au Venezuela, les investisseurs misent sur un futur hypothétique

À des milliers de kilomètres de là, c''est un autre paradoxe que l'on va détailler ensemble. Le Venezuela, en défaut de paiement depuis 2017 et toujours sous sanctions américaines, voit pourtant ses obligations en dollars s’envoler : plus de 50 % de hausse cette année.

En toile de fond, un bras de fer entre Caracas et Washington. Donald Trump a intensifié la pression contre le régime de Nicolás Maduro, notamment sous prétexte de lutte contre le narcotrafic au large des côtes vénézuéliennes. Il a même évoqué la possibilité de frappes au sol. Mais du côté des marchés, cette tension est perçue comme une opportunité.

Les investisseurs parient sur l’affaiblissement du pouvoir de Maduro et, à terme, sur une possible transition politique. Et qui dit nouveau régime, dit peut-être restructuration de la dette et retour du Venezuela sur les marchés internationaux. Les investisseurs n’achètent donc pas la réalité du moment, mais la probabilité d’un futur plus stable.

Quand la spéculation devient auto-entretenue

Cette logique n’est pas nouvelle : les marchés réagissent avant tout à leurs propres anticipations. Ils ne répondent pas aux faits, ils tentent de devancer ce que les autres investisseurs vont anticiper. C’est une forme de spéculation pragmatique, parfois cynique, mais au cœur du fonctionnement des marchés mondiaux.

L’histoire regorge d’exemples : la nuit de l’élection de Donald Trump en 2016, les marchés se sont effondrés avant de rebondir dès le lendemain, anticipant une politique pro-entreprises. Même phénomène en 2022 lors de l’invasion de l’Ukraine : après un plongeon initial, les investisseurs ont rapidement misé sur les profits des secteurs de l’énergie et de l’armement. Le danger, c’est que cette dynamique devienne une méthode Coué financière : les investisseurs s’observent, se copient et s’auto-persuadent pour ne pas rater la bonne affaire. Mais attention, à force de faire des paris sur des paris, les marchés finissent parfois par se tromper.

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