Chemins d'écriture

«Chemins d’écriture» au rendez-vous de la rentrée littéraire 2023

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Rentrée littéraire oblige, cette semaine, Chemins d’écriture se conjugue au pluriel. Au menu, une sélection de quatre romans pour évoquer la production africaine. Une sélection qui se veut à l’image des promesses de la saison littéraire qui s’ouvre. Elle se veut diverse et puissamment engagée, comme le rappelle la chronique qui suit, faisant entendre les voix de Nathacha Appanah, Ananda Devi, NoViolet Bulawayo, Wilfried N’Sondé et Christiane Fioupou, traductrice de Wole Soyinka.

La sélection de romans africains se veut riche, diverse et engagée.
La sélection de romans africains se veut riche, diverse et engagée. © Mercure de France / Seuil / Autrement / Grasset / Montage RFI
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Très attendu, Chronique du pays des gens les plus heureux du monde, le dernier roman du prix Nobel de littérature nigérian Wole Soyinka est enfin disponible en français. Plus connu comme dramaturge et essayiste, Soyinka n’a écrit que trois romans. Le nouvel opus du maître d’Abeokuta est présenté par Christiane Fioupou, éminente spécialiste des lettres nigérianes :

« C’est une histoire qui commence sur la présentation de Papa Davina, un charlatan qui a fondé une nouvelle secte, comment il est devenu charlatan, et au milieu de tout ça, le magnifique portrait d’un chirurgien qui est censé réparer les vivants qui ont été tués dans des explosions dans le nord par Boko Haram. Et va se rajouter le scandale que cet homme découvre quand il voit que les parties humaines sont revendues pour en faire des amulettes. C’est un roman impressionnant, c’est foisonnant, bouillonnant, rythmé, dense, des intrigues avec des rebondissements, du suspense. C’est une sorte de thriller, une satire politique avec des personnages haut en couleur. »

Glory sous la plume de la Zimbabwéenne NoViolet Bulawayo est le second titre de la sélection. Original, inventif et drôle, ce roman est une réécriture d’Animal Farm de George Orwell, adapté à la situation au Zimbabwe. Dans les rôles principaux, un cheval, une ânesse, un cochon et des chiens habillés en tuniques de toutes les couleurs. Sur le sens de l’animalisation de la classe politique de son pays, écoutez l’auteure NoViolet Bulawayo :

« Le Zimbabwe a souvent été comparé à une ferme aux animaux. Pour moi, écrire sur ce pays a toujours été compliqué, car rien ne s’y fait normalement. Pour raconter une dictature où tout est tellement absurde que l’on a toujours besoin d’une grille de lecture spéciale pour appréhender la folie et le chaos qui y règnent. La satire ou la métaphore animalière me semblent des modes narratifs adaptés à l’écriture de la dictature. D’ailleurs, ce n’est sans doute pas un hasard si les récits animaliers comptent parmi les formes narratives les plus anciennes du monde. La forme fabuliste que j’ai choisie pour écrire Glory a ses origines dans ces recherches et réflexions. »

Le troisième titre de la sélection est La mémoire délavée de la Mauricienne Nathacha Appanah. Paru dans la prestigieuse collection « Traits et Portraits », rédigé dans un style étonnamment maîtrisé, La mémoire délavée n’est pas un roman, mais, comme l’explique Appanah dans une vidéo publiée par son éditeur :

« La Mémoire délavée, c’est un récit sur mes grands-parents. Mon intention était de raconter leur vie et à travers leur vie raconter une traversée du siècle. Mes grands-parents sont les petits-enfants d’engagés indiens qui sont arrivés à l’Ile Maurice pour remplacer les esclaves noirs. Et moi, j’ai vécu avec mes grands-parents pendant les dix premières années de ma vie dans leur maison. Ils représentaient un monde complètement disparu. Moi, j’allais à l’école. Mes parents avaient été à l’école. J’apprenais des langues. Eux, ils n’en parlaient qu’une. Ils ne savaient ni lire ni écrire. J’ai évolué sur une ligne, comme une ligne en fil d’acrobate, entre un monde perdu et le monde moderne, si vous voulez. »  

La Reine aux yeux de lune du Congolais Wilfried N’Sondé est le quatrième titre de la sélection. Inspiré d’un personnage réel, ce roman raconte le destin d’une femme sacrifiée dans le royaume Kongo, au XVIIe siècle. Qui était Kimpa Vita ? Sainte ou sorcière ? L’auteur répond :

« Kimpa Vita par certains traits ressemble à Jeanne d’Arc, puisque quand elle était jeune, une jeune femme, elle est morte sur le bûcher avec un corpus mystique très fort. À cela près, Kimpa Vita n’était pas une combattante, elle était fondamentalement pacifiste. Mais c’est une figure universelle parce qu’elle avait d’emblée une ambition de réconciliation entre Européens et Africains, ce qui est encore d’actualité. »

Chronique du pays des gens les plus heureux du monde, par Wole Soyinka. Traduit de l’anglais par David Fauquenberg et Fabienne Wole Soyinka. Editions du Seuil

Glory, par NoViolet Bulawayo. Traduit de l’anglais par Claro. Editions Autrement, 453 pages, 23,90 euros

La mémoire délavée, par Nathacha Appanah. Collection « Traits et Portraits ». Editions Mercure de France, 148 pages, 17,50 euros

La Reine aux yeux de lune, par Wilfried N’Sondé. Editions Robert Laffont, 232 pages, 20 euros

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