Faut-il encore écrire à la main à l’heure du tout numérique ? La question mérite d’être posée quand partout sur les réseaux des influenceurs vantent l’écriture manuscrite et que, selon un sondage OpinionWay, 69 % des Français regrettent de ne pas écrire davantage à la main. Comment comprendre ce sondage ? C’est de la nostalgie de la part des Français ou un rejet des écrans et des claviers qui envahissent notre quotidien ?

Invités :
- Grégoire Borst, professeur de psychologie de l’enfant à l’université Paris Cité.
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Philippe Dabasse, graphiste-typographe, formateur et calligraphe.
Dans un monde de plus en plus numérique, l’écriture manuscrite conserve une place centrale dans l’apprentissage. C’est ce que défend avec conviction Grégoire Borst. Pour lui, écrire à la main reste primordial, et ce, pour deux raisons fondamentales :
La première, c’est que c’est une façon de développer sa motricité fine, la motricité de nos petits doigts. Mais c’est aussi très important parce que quand on apprend la graphie des lettres, ça aide notre cerveau à mieux lire les lettres.
Apprendre à bien écrire, à bien former les lettres, c'est une préoccupation des pédagogues comme Grégoire Borst qui réfléchissent sur l'apprentissage de l'écriture des enfants : « C'est un enjeu effectivement, il y a une difficulté dans l'apprentissage du langage écrit dans notre pays. On voit qu'il y a des inégalités extrêmement fortes du point de vue de la capacité à bien apprendre à lire et que, encore une fois, la cursive, l'apprentissage de l'écriture, aide finalement à mieux lire. Et au-delà de mieux lire, ça aide aussi à penser. On voit bien que quand on écrit, il y a un rythme dans l'écriture qui nous contraint d'une certaine manière. On ne peut pas écrire très vite, contrairement à ce qu'on peut faire avec nos claviers. Et donc, on a une obligation de réfléchir, de penser avant d'écrire. Et ça, c'est assez transformant. Parce que l'éducation, c'est apprendre à penser. Et donc, peut-être que l'apprentissage de l'écriture, le fait de continuer à utiliser l'écrit, c'est une façon de mieux penser. »
Notre deuxième invité nous apprend à écrire, il est formateur, et il nous apprend la calligraphie, la « belle écriture ». Philippe Dabasse :
La belle écriture, c’est apprendre à maîtriser les gestes historiques et toute l’évolution de ces gestes, de l’écriture latine, pour en maîtriser les codes et, ou bien, se les approprier pour soi-même, ou bien pour des professionnels en acquérir les codes pour des utilisations dans leur domaine d’activité.
Dans son centre de formation, Philippe Dabasse accueille des graphistes, des dessinateurs de caractères, des peintres en lettres... Il enseigne la calligraphie latine : « Si vous suivez les cours de calligraphie latine, vous ne serez pas que moine, vous pourrez être maître-écrivain, vous pourrez être esclave sous l'Empire romain… Vous pourrez découvrir plein de facettes de notre histoire, c'est une porte d'entrée vers l'histoire de notre civilisation gréco-romaine. Et c'est tout à fait passionnant de suivre les traces de ces gens qui ont écrit toutes ces lettres. »
Parce que Philippe Dabasse raconte aussi l'histoire, il n’enseigne pas que le geste, il apprend aussi comment ce geste s'inscrit dans le temps et dans l'espace géographique de l'Occident : « Chaque période génère un contexte pour l'écriture, que ce soit par des contraintes ou des changements de société : l'apparition du livre manuscrit, le codex, le rotulus ou les élections à Pompéi… Tous ces contextes-là génèrent des formes d'écriture spécifiques. »
Dans la chronique Ailleurs, nous parlerons du Festival des Littératures du Sud avec Marielle Anselmo, co-organisatrice de l’événement. Ce festival se tiendra les 17 et 18 octobre 2025 sur l’île de Djerba.
Programmation musicale : Vanessa Paradis – Le retour des beaux jours
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