Vitali Klitschko, l’ancien boxeur devenu maire de Kiev
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Il a troqué ses gants de boxe contre des armes pour défendre sa ville. Le maire de Kiev Vitali Klitschko se dit prêt à tout pour défendre Kiev face aux soldats russes qui menacent d’encercler la capitale ukrainienne. Ancien champion du monde de boxe, catégorie poids lourds, il incarne avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky la résistance de tout un pays face à la Russie. Portrait d’un champion hors norme entré en politique par vocation, et en guerre par nécessité.
Le regard braqué vers le téléphone qu’il tient à bout de bras Vitali Klitschko s’adresse aux habitants de Kiev. Nous sommes le 15 mars, l’armée russe menace d’encercler la ville et le maire de la capitale ukrainienne lance un appel à tous les hommes en âge de se battre. « La capitale, c’est le cœur de l’Ukraine, elle sera défendue. Kiev est l’avant-poste et le symbole de la sécurité de l’Europe et de la liberté. Nous ne la céderons pas et nous ne les laisserons pas nous mettre à genoux. »
Depuis le début du conflit, le maire de Kiev multiplie les messages sur les réseaux sociaux pour encourager les Ukrainiens à résister. Et se montre présent sur tous les fronts, gilet pare-balle sur le dos, arme automatique à portée de main : aux check-points, sur les barricades, dans les abris anti-aériens… Étonnant destin que celui de cet ancien champion de boxe devenu maire d’une capitale assiégée.
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« Un menton d’acier »
Car, avant de se lancer en politique, Vitali Klitschko était l’un des boxeurs les plus doués de sa génération, plusieurs fois champion du monde dans la catégorie poids lourd, comme son frère Wladimir, de cinq ans son cadet. « Vitali était doté de qualités physiques extraordinaires, moins rapide que son frère, mais avec une solidité mentale et un menton d’acier », se souvient le journaliste Jean-Philippe Lustyk, auteur du Grand Livre de la Boxe (Ed. Marabout). « Et l’une des principales qualités d’un boxeur c’est sa capacité à résister, à encaisser les coups. Vitali avait une puissance dévastatrice puisqu’il n’a subi que deux défaites dans sa carrière et a 41 K.O à son actif… C’est l’un des ratios les plus élevés de l’histoire de la boxe ! »
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Avec son frère Wladimir, il rafle tous les titres et impose sa loi sur les rings dans les années 2000. Un pacte et une promesse les lient, faits à leur mère, celle de ne jamais se combattre. « Ils avaient une énorme discipline, héritée de leur père qui était général de l’armée soviétique, l’un des “liquidateurs” de Tchernobyl », rappelle Jean-Philippe Lustyk. « Ils avaient également un courage énorme et un comportement sur le ring qui correspondait à leur comportement dans la vie : pas de provocations, pas d’écarts de langage… De la suffisance, de l’orgueil inhérent à des champions, mais aussi une droiture et une grande intelligence puisque les deux ont fait des études scientifiques. »
L’un des leaders de Maïdan
Dans les années 2000, auréolé de ses succès sur le ring, Vitali Klitschko tente une première fois de s’imposer en politique. Il échoue à deux reprises à s’emparer de la mairie de Kiev, mais démontre déjà un certain savoir-faire. « Parmi d’autres grands sportifs qui ont essayé de se lancer en politique dans les années 2000, lui était le plus préparé », raconte le journaliste Volodymyr Yermolenko. « Il y a eu d’autres tentatives comme celle par exemple d’Andriy Chevtchenko, notre star de football, mais Klitschko, dès le début, a montré une certaine maturité politique. »
La carrière politique de Vitali Klitschko va réellement décoller à la faveur de Maïdan, le mouvement pro-européen qui éclate à Kiev en 2014. « Il était très impliqué dès le début, et il est devenu l’un des trois leaders du mouvement avec Arseni Iatseniouk et Oleh Tyahnybok. Iatseniouk c’était plutôt l’intellectuel, Tyahnybok était un leader nationaliste, mais Klitchko c’était plutôt le côté “fort ” de Maïdan. »
Les maires en première ligne
Après Maïdan Vitali Klitchko envisage de briguer la présidence, mais il renonce et finit par soutenir Petro Porochenko, qui sera battu en 2019 par Volodymyr Zelensky. Mais l’ancien boxeur parvient à conquérir la mairie de Kiev, un poste devenu très important en Ukraine du fait des réformes de décentralisation, qui ont donné davantage de pouvoir aux grandes villes. Ces réformes expliquent d’ailleurs, aux yeux de Volodymyr Yermolenko, le rôle crucial joué depuis le début de la guerre par les maires des villes assiégées par l’armée russe.
Cet esprit de décentralisation est très important en Ukraine et donc tout ne passe pas uniquement par Zelensky, il y a une pluralité de pouvoir en Ukraine qui est très importante maintenant. Et ce n’est pas seulement Klitchko c’est aussi le maire de Kharkiv qui joue un rôle important, c’est aussi celui de Tchernihiv, ou celui de Mikolaïev. Cet esprit de résistance vient du peuple, des communautés, de chaque citoyen et il est évidemment représenté par les villes, par les autorités locales.
Aujourd’hui âgé de 51 ans, Vitali Klitschko s’est inscrit comme son frère dans les troupes de réserve de l’armée ukrainienne, prêt à se battre les armes à la main pour défendre sa ville. Un ultime combat pour l’ancien boxeur devenu l’une des figures de la résistance ukrainienne.
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