Italie: Silvia Salis, une lanceuse de marteau à la mairie de Gênes, et bientôt Première ministre?
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Depuis son élection surprise en mai 2025 en tant que maire de Gênes, Silvia Salis dynamite la scène politique italienne : nouvel optimisme progressiste, soutien à la flottille pour Gaza, administration majoritairement féminine... Au point d'avoir un destin national ?

Silvia Salis a peut-être écrit son autobiographie un peu trop tôt. La bambina più forte del mondo (La petite fille la plus forte du monde, éditions Salani) : un livre pour enfants sorti en 2022 dans lequel elle raconte sa jeunesse de lanceuse de marteau. Ou comment elle a dû jouer des coudes dans un environnement masculin avant de devenir dix fois championne d'Italie et de participer à deux reprises aux Jeux olympiques.
En 2025, la jeune femme passe des stades d'athlétisme à l'arène politique. Elle est en train de s'imposer dans un autre milieu à peine plus féminin : celui de la politique italienne. Sa candidature d'indépendante de centre-gauche pour la mairie de Gênes a obtenu le soutien d'une très large coalition. La réformiste séduit, de la gauche socialiste aux centristes libéraux en passant par l'attrape-tout Mouvement 5 étoiles. C'est ainsi qu'en mai 2025, elle est élue maire de la sixième ville d'Italie, à 39 ans.
Une transition tout en douceur
Ce passage du sport à la politique ne s'est pas fait du jour au lendemain. « Après sa carrière d'athlète, elle a eu un poste au Coni, le comité olympique italien, rembobine Massimiliano Panarari, professeur de communication politique à l'université de Modène et Reggio Emilia et éditorialiste à La Stampa. Avant cela, elle a même dirigé l'équipe d'athlétisme de la police pénitentiaire et s'est occupée du marketing à la fédération. »
Des postes à responsabilité, donc, « mais aucune expérience politique directe dans la politique politicienne à l'intérieur d'un parti », note Massimiliano Panarari. Silvia Salis apporte alors de la fraîcheur au débat politique. Il faut dire qu'avec un père communiste et une mère fonctionnaire, elle ne partait pas de si loin.
« C'est une figure entre le sport et la politique spectacle, qui a épousé le très célèbre metteur en scène Fausto Brizzi, analyse le professeur de communication politique. Silvia Salis représente un exemple de ce qu'on pourrait appeler une ''poussée anti-politique'', mais pas négative, dans le paysage politique italien. »
Une caractéristique qui se remarque, dans ce paysage marqué par le populisme. Mais cela n'empêche pas l'ancienne athlète, qui court toujours 10 kilomètres chaque matin, de prendre des mesures fortes. Dès sa prise de fonction à Gênes, elle nomme une majorité de sept femmes sur les douze membres de son équipe municipale.
Un réformisme mieux taillé pour affronter Giorgia Meloni
En voyant Silvia Salis prendre les rênes du mouvement pro-palestinien italien, certains la voient déjà mener la gauche à la conquête du poste de Première ministre en 2027. La lanceuse de marteau affiche en effet son soutien à la flottille pour Gaza au départ de Gênes fin août. « Palestina libra ! », scande-t-elle encore samedi 27 septembre aux manifestations contre les ventes d'armes à Israël, toujours dans le port de Gênes.
Elle aime également mobiliser le passé de Gênes, ville résistante à l'extrême droite, qu'elle soit nazie ou fasciste. Mais sa position sur Gaza reste commune à toute la gauche italienne. Si Silvia Salis se distingue d'Elly Schlein, la cheffe du Parti démocrate et leader de l'opposition, c'est plutôt grâce à sa modération sur les autres sujets.
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La gauche gagnerait-elle à être plus réformiste que radicale ? « On entre aujourd'hui dans une nouvelle phase, pour Lorenzo Castellani, professeur d'histoire et d'institutions politiques à l'université Luiss à Rome. Giorgia Meloni se présentait en anti-système, une politicienne d'extrême droite. Or, après trois ans de pouvoir, elle s'avère bien plus modérée que prévu et fait valoir ses talents de politicienne... On est donc loin de l'anti-système ! Cela pourrait changer la stratégie de la coalition de gauche. Celle-ci pourrait chercher un nouveau candidat capable aussi d'attirer les électeurs de droite. »
Un registre dans lequel Silvia Salis brille justement à Gênes. Mais pour convertir l'essai à l'échelon national, son inexpérience pourrait finalement se retourner contre elle. « C'est extrêmement compliqué de passer au niveau national depuis une ville comme Gênes, qui bien sûr avait été gagnée par la droite, mais qui a quand même des traditions progressistes », nuance en effet Massimiliano Panarari.
Silvia Salis jure pour l'instant se consacrer entièrement à la mairie de Gênes, ainsi qu'à son jeune fils. Ce dernier porte le nom du père de Silvia, Eugenio, mort brutalement au début de la campagne pour les municipales.
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