Robert Golob, le nouvel homme providentiel de Slovénie
Publié le :
Les sondages prédisaient un résultat serré, mais c’est finalement une large victoire qu’a remportée le libéral Robert Golob face au dirigeant slovène Janez Janša. Accusé d’avoir porté atteinte à la démocratie et à l’État de droit, le Premier ministre sortant est battu par un homme d’affaires tout récemment entré en politique. Robert Golob, 55 ans, s’était présenté comme le candidat du changement, de la démocratie et de l’attachement à l’Union européenne.

L’ambiance est survoltée au quartier général de Robert Golob. Nous sommes le 24 avril au soir, les résultats viennent de tomber et le candidat de centre-gauche l’emporte très largement : plus de 34% des voix, et un écart de dix points avec son adversaire, le Premier ministre sortant Janez Janša.
Isolé pour cause de Covid-19, c’est pourtant de son domicile, par liaison vidéo, que le vainqueur des législatives s’adresse à ses partisans. « Les gens ont confiance en nous et en notre capacité de changement. Aujourd'hui, ils dansent et j'attends de vous que vous dansiez également, mais dès demain nous devons commencer à travailler pour justifier cette confiance. Voilà notre engagement pour tous : liberté ! »
Il y a encore six mois, personne n’aurait parié sur un tel dénouement. Ingénieur de formation, Robert Golob est un expert en énergie solaire et c’est l’interventionnisme du gouvernement qui le pousse à s’engager en politique. « Robert Golob a longtemps dirigé l’un des principaux groupes énergétiques de Slovénie et il a réussi à en faire un groupe très important dans la région, explique le politologue slovène Aljaž Pengov Bitenc. À la fin de son mandat de quatre ans, il paraissait logique de le reconduire, car le groupe se portait très bien ! Mais il se trouve que le gouvernement de Janez Janša voulait contrôler cette compagnie pour prendre le contrôle de l’ensemble du secteur énergétique. Et donc le gouvernement a tout fait pour se débarrasser de lui. »
« Entrepreneur politique »
Cheveux mi-longs, allure romantique et savoir-faire politique : Robert Golob décide alors de se lancer en campagne pour vaincre Janez Janša, un ultraconservateur proche du dirigeant hongrois Viktor Orban. Le candidat de centre-gauche va mener une campagne éclair en reprenant un petit parti écologiste. Et devient, en quelques mois seulement, le principal adversaire du pouvoir en place.
« C'est le résultat d'un phénomène politique assez courant aujourd’hui, décrypte Romain le Quiniou, directeur général du centre de réflexion Eurocreative. Robert Golob est une sorte d'entrepreneur politique qui parvient à monter un parti très rapidement et à atteindre un résultat. On en a eu l'expérience en France, par exemple avec Emmanuel Macron et la formation En Marche. »
Robert Golob a aussi bénéficié de la volonté d’une large partie de la population slovène d’en finir avec Janez Janša, qui faisait figure d’épouvantail pour un grand nombre d’électeurs. « Robert Golob a réussi à se poser comme la seule alternative à Janez Janša, critiqué pour la dégradation de l’État de droit à la fois en Slovénie, mais aussi à l’étranger, notamment au sein de l’Union européenne. »
Ancrage européen
Nouveau venu sur la scène politique slovène, Robert Golob incarne la figure de l’homme providentiel, un parcours fulgurant qui n’est pas sans précédent en Slovénie, où les carrières politiques se font et se défont à très grande vitesse. « La Slovénie est dans une période de son développement démocratique où de nouveaux visages apparaissent régulièrement », explique le politologue Aljaž Pengov Bitenc.
« À chaque fois, les gens projettent leurs peurs, leurs désirs sur cette nouvelle personne, et il est impossible de les satisfaire ! Cela dit, de toutes ces personnalités "neuves" que la Slovénie a connu ces dernières années, Robert Golob semble être le mieux armé pour réussir. Non seulement parce qu’il a une expérience de manager, mais aussi parce qu’il est capable d’apprendre des erreurs commises par ses prédécesseurs… Et surtout parce qu’il y a une volonté partagée entre lui et l’opposition de gauche de travailler ensemble. »
Robert Golob devrait former son gouvernement dans les prochaines semaines. Il s’est déjà engagé, à rebours de son prédécesseur, à garantir l’indépendance des médias publics, et à retisser des liens solides avec l’Union européenne.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne