De l’influence d’un stress collectif sur notre cerveau
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Retour sur les répercussions du confinement lié à la Covid-19. Des chercheurs en neurosciences ont voulu savoir, si ce stress émotionnel collectif s’était traduit par des modifications mesurables sur le cerveau humain. La réponse est positive.

C’est le résultat d’une étude étonnante dirigée par le professeur Éric Guedj, de l’université d’Aix-Marseille, pionnier de ce qu’on appelle les neurosciences des populations (qui étudient les effets de l’environnement social et émotionnel sur le cerveau humain). En collaboration avec le psychiatre Wissam El-Hage, professeur à l’université de Tours, ils ont eu l’idée de comparer l’intensité des émotions négatives, comme la peur, la tristesse ou la colère, exprimées massivement pendant le confinement sur les réseaux sociaux. Plus de deux milliers de tweets, géolocalisés en France, ont été échangés entre mars et mai 2020.
En croisant l’analyse de ces tweets avec celle des imageries cérébrales réalisées dans le même temps sur 95 de leurs patients, atteints de pathologies neurologiques, le résultat est sans appel. Les jours où les émotions négatives étaient collectivement les plus intenses sur les réseaux sociaux, les chercheurs ont observé une diminution significative de l’activité métabolique dans les deux zones du cerveau impliquées dans le réseau cérébral de la peur : le cortex préfrontal et le cortex cingulaire antérieur, connus pour leur rôle dans la gestion des émotions et du stress. Démontrant ainsi de façon objective, c’est une première, qu’un climat de stress émotionnel collectif pouvait engendrer des modifications mesurables dans le cerveau.
Un stress émotionnel collectif peut laisser des traces dans le cerveau
Tout particulièrement chez des sujets neurologiquement vulnérables, comme c’est le cas dans cette étude, parue dans la revue Frontiers in nuclear Medecine. Reste maintenant à étudier si ces effets persistent sur le long terme, mais aussi comment cela est transposable à la population générale. En attendant, ce nouveau champ de recherche devrait permettre de prendre conscience, voir d’anticiper les conséquences d’un stress collectif sur notre santé mentale, en identifiant à la fois des marqueurs de vulnérabilité individuelle et des signaux d’alerte à l’échelle de la population générale.
« Nos résultats illustrent l'importance des interactions entre société et cerveau. En révélant un lien entre le climat émotionnel collectif et des biomarqueurs cérébraux objectifs, cette étude ouvre de nouvelles perspectives en neuroscience sociétale pour mieux comprendre et prévenir les effets des crises collectives sur la santé mentale », explique le professeur Éric Guedj. Vu le nombre de crises en tout genre et de conflits auxquels nous sommes confrontés, il y a plus qu’intérêt à poursuivre ces recherches sur l’influence des stress collectifs sur notre santé en général.

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