L'Épopée des musiques noires

Tonton Manu

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Durant les cinq dernières années de sa vie, Manu Dibango parcourut le monde comme jamais pour honorer les sollicitations de ses admirateurs. Alors octogénaire, il était devenu un pilier de L’Épopée des musiques noires et son aura suscitait de nombreuses invitations. À New-York, à Rio, à Douala, à Londres, à Paris, il répondait présent et nourrissait les séquences d’un documentaire réalisé par Thierry Dechilly et Patrick Puzenat. Ce film sera sur les écrans français le 20 octobre. Les auteurs de ce périple musical et cinématographique sont nos invités.

Manu Dibango répète avant son concert à l’Apollo de Harlem en 2015.
Manu Dibango répète avant son concert à l’Apollo de Harlem en 2015. © Bonne Nouvelle Productions/5.2.3. Productions
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Patrick Puzenat et Thierry Dechilly, réalisateurs de «Tonton Manu».
Patrick Puzenat et Thierry Dechilly, réalisateurs de «Tonton Manu». © RFI/Joe Farmer

Derrière son rire tonitruant, Manu Dibango ne révélait que très rarement ses doutes, ses fragilités, ses fêlures. L’œil d’une caméra parviendra pourtant à percevoir quelques intimes émotions du chef d’orchestre. « Tonton Manu » n’est pas une œuvre biographique, mais la balade transcontinentale d’un homme chaleureux de retour sur les terres de sa jeunesse. Retrouver le collège de Saint-Calais où il fut scolarisé en 1949, arpenter les rues de Harlem où il connut un succès foudroyant en 1972 grâce au titre Soul Makossa, accepter les honneurs d’Abidjan où il dirigea l’orchestre de la Radio Télévision ivoirienne en 1976, se perdre dans les clubs parisiens où il découvrait le jazz dans les années 50, tous ces instants de mémoire marquent les étapes d’une vie palpitante dont la force narrative rejaillit sous nos yeux attendris. 

Manu Dibango accorde une interview à la télévision brésilienne à Rio de Janeiro en 2016.
Manu Dibango accorde une interview à la télévision brésilienne à Rio de Janeiro en 2016. © Bonne Nouvelle Productions/5.2.3. Productions

Commentée par quelques témoins et amis prestigieux (Yannick Noah, Courtney Pine, Wally Badarou, Ray Lema, Omar Sosa…), cette plongée dans les souvenirs de Manu Dibango éclaire son cheminement artistique au fil des décennies. Soudain, le compositeur, trop souvent mésestimé, rayonne et nous éblouit. Sa rigueur en studio, son amabilité professionnelle dans les médias, sa solide présence sur scène, son altruisme attentif, son humilité sincère, illuminent ce portrait attachant. Les petites anecdotes et réflexions captées durant le tournage trahissent subrepticement la destinée unique de ce saxophoniste et vibraphoniste de talent qui ne se vantait pas, ne fanfaronnait, ne se targuait pas d’avoir croisé les grands de ce monde. 

Manu Dibango en studio travaille sur une composition du pianiste cubain Omar Sosa.
Manu Dibango en studio travaille sur une composition du pianiste cubain Omar Sosa. © Bonne Nouvelle Productions/5.2.3. Productions

Comme le montrent les 90 minutes de ce road movie haletant, Manu Dibango mettait à profit sa notoriété pour défendre certaines convictions : l’histoire, le patrimoine, l’éducation, le partage, la tolérance. Son ami, le pianiste Ray Lema, note d’ailleurs, lors d’une séquence tournée à Rio de Janeiro, que la fusion des cultures est possible au Brésil quand les tentatives de rapprochement afro-européen restent encore très timides, notamment dans l’univers de la musique classique. Manu Dibango démontrera quelques mois plus tard que la persévérance porte ses fruits en présentant un « Safari Symphonique » à Paris. Ce sera son ultime défi et le bouquet final d’une aventure humaine riche et passionnante. 

► À voir : Bande annonce du documentaire de Thierry Dechilly et Patrick Puzenat. Portrait d'un musicien exceptionnel : Manu Dibango.

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