Ils se disent de gauche, anticoloniaux, pour la paix. En France, des juifs se rassemblent chaque semaine pour dire stop aux bombardements d'Israël sur Gaza, en réponse à l'attaque du Hamas sur l'État Hébreu le 7 octobre. Une voix singulière que ces citoyens entendent bien faire entendre. Quitte à, parfois, souffrir d'incompréhension de la part de leurs amis ou de leur famille. Pour certains, c'est l'occasion de s'interroger sur ce que signifie être juif.
Sa veste remontée jusqu'au cou, Anna ajuste les bonnets de ses filles. Bien se couvrir, pour ne pas tomber malade et rater un jour de classe à la Talmud Torah, l'école primaire juive. Mais, avant la reprise des cours, cette mère de 37 ans a décidé d'emmener ses filles manifester à Paris pour demander un cessez-le-feu immédiat à Gaza.
« J'essaie de venir chaque samedi. Mais entre ce samedi et samedi prochain, ce sont des milliers d'enfants et des milliers de personnes qui meurent sous les bombes. Et ça, pour moi, c'est insupportable. Donc, on doit arrêter l'hémorragie », témoigne Anna.
Pour elle, la religion juive est au fondement de son identité. Transmettre cette histoire, cette culture à ses filles, il n'y a rien de plus important.
Depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas, certaines personnes au sein de sa communauté lui reprochent son discours en faveur des Palestiniens. « Effectivement, il y a eu beaucoup de dissensions et je me suis sentie très seule. Pour autant, ça reste ma communauté. Donc, j'ai vraiment envie de continuer à transmettre et je pense que notre foi ou notre culture est au-dessus de ça. En tout cas, moi, j'ai envie de rester juive », explique-t-elle.
La France, pays à la plus grande communauté juive d'Europe
Anna et ses filles se faufilent au milieu des milliers de manifestants, avant d'atteindre le groupe qu'elles retrouvent chaque semaine. Ils sont une cinquantaine ce samedi, rassemblés derrière différentes banderoles : « Juifs et juives pour un cessez-le-feu immédiat » ; « pas de crime en notre nom », ou encore « Collectif juif décolonial ». Cette dernière, en lettres capitales sur fond noir, c'est celle de Tsedek, qui signifie « justice » en hébreu.
Maxime milite dans cette association depuis sa création, en juin 2023. « Je pense que, en tant que juif, notre identité, elle est par défaut assignée au sionisme et à Israël. Et l'idée avec ce collectif, c'est de se battre contre Israël en tant qu'entité coloniale et c'est de renouer avec une identité politique autre que celle qui nous est donnée par défaut en tant que juif. Maintenant, on a de plus en plus de personnes qui nous contactent, donc je pense qu'il y a une bonne partie des juifs qui se posent des questions sur Israël, sur le sionisme, qui aimeraient mieux comprendre. »
Ses positions ouvertement critiques envers la politique de l'État d'Israël valent au collectif de nombreuses attaques. Certains allant même jusqu'à accuser Tsedek, association juive, d'antisémitisme.
Un sujet hyper sensible, admet Inès. Mais qu'importe : aujourd'hui, cette Française qui a grandi à Jérusalem marche aux côtés du collectif, le sourire aux lèvres. « Je suis contente de voir qu'il y a de plus en plus de collectifs. Moi, pendant longtemps, j'étais un peu toute seule dans mon coin avec ces idées-là et je trouve ça bien parce qu'on n'entend pas beaucoup ces voix-là. De toute façon, on est tous et toutes très différents, donc c'est important qu'il y ait une diversité des voix », se réjouit-elle.
Pour Inès, l'identité juive ne peut se résumer à un seul discours. Surtout en France, dans la plus grande communauté juive d'Europe.
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