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Pakistan: le réseau social X bloqué pour des raisons de «sécurité nationale»

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Au Pakistan, depuis deux mois, les internautes ne peuvent plus accéder à X, anciennement Twitter, en tout cas sans VPN. Le ministère de l'Intérieur s'est justifié mercredi 17 avril et a évoqué des raisons de sécurité nationale, mais la mesure est vivement conspuée. « Nous continuons de travailler avec le gouvernement pakistanais pour comprendre ses préoccupations », a indiqué sur X l'équipe de communication du réseau, commentant ainsi pour la première fois le blocage en vigueur depuis le 17 février.

Un homme utilise la plateforme de réseau social X sur son téléphone, sur un marché à Islamabad, au Pakistan, le 17 avril 2024.
Un homme utilise la plateforme de réseau social X sur son téléphone, sur un marché à Islamabad, au Pakistan, le 17 avril 2024. © AFP - FAROOQ NAEEM
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De notre correspondante à Islamabad,

Tout commence mi-février, lors des élections législatives au Pakistan. Le jour de la tenue du scrutin, les services de téléphonie mobile sont suspendus par les autorités jusqu'au lendemain soir, alors que le pays attendait les résultats. Le gouvernement a invoqué à ce moment-là des raisons de sécurité, mais sans donner plus de détails. Ce que l'on sait, c'est que la suspension temporaire de l'accès au réseau social X a été décidée suite à des rapports confidentiels des services de sécurité pakistanais qui mettent en cause « des éléments hostiles qui opèrent sur Twitter et qui ont pour objectif de créer le chaos et l'instabilité dans le but de plonger le pays dans une forme d'anarchie ». 

Une suspension poursuivie au-delà du scrutin

Plus de 50 attaques terroristes présumées se sont déroulées dans le sud-ouest et le nord-ouest du Pakistan le jour des élections, mais cela n'a pas été perçu comme particulièrement alarmant, dans un pays où les attaques sont récurrentes.  C'est pour cela que la question de la suspension de X interroge.

Pour comprendre, il faut rappeler le contexte des élections et de la crise politique qui a secoué le Pakistan avant et pendant le scrutin. Ce scrutin a été entaché par les accusations de fraude électorale, qui ont d'ailleurs envahi les réseaux sociaux le soir des élections. Certains électeurs ont posté des vidéos des coulisses de certains bureaux de vote où le chaos régnait. Certains responsables locaux ont même reconnu avoir procédé ou aidé à des fraudes électorales dans des vidéos publiées sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, le parti de l'ancien Premier ministre emprisonné, Imran Khan, avait appelé à manifester contre l'aveu d'un fonctionnaire qui reconnaissait dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux avoir facilité les fraudes dans sa circonscription.

Alors que les autorités invoquent le risque de chaos, les militants du Mouvement du Pakistan pour la justice (PTI), le parti d'Imran Khan, eux, en appellent à la transparence des résultats. Les autorités pakistanaises ont longtemps nié avoir interdit la plateforme X et finalement, ce mercredi 17 avril, des documents émanant du gouvernement et consultés par plusieurs médias, montrent que les autorités ont décidé d'interdire X, dans « l'intérêt de la sécurité nationale, du maintien de l'ordre public et de la préservation de l'intégrité de la nation ». Le gouvernement déclare, par ailleurs, que la plateforme avait été réticente à résoudre les problèmes de sécurité soulevés par les autorités pakistanaises. 

Atteinte aux libertés 

Plusieurs organisations internationales dénoncent une atteinte à la liberté d'expression. Les militants du PTI y voient, eux, une volonté des autorités de faire taire, voire disparaître, le parti d'Imran Khan, qui a d'ailleurs été exclu du scrutin en février dernier. Le réseau X a été le médium principal de campagne et de communication de l'ancien Premier ministre, qui à lui seul a 20,6 millions d'abonnés sur X. Le PTI est notamment l'utilisateur le plus prolifique des réseaux sociaux au Pakistan depuis que les médias traditionnels dans le pays ont commencé à censurer les informations concernant Imran Khan et son parti, à l'approche des élections.

L'espace d'expression libre est réduit de façon générale et se réduit de plus en plus. Il y a quelques semaines, par exemple, le ministre de l'Intérieur avait déclaré sur une chaîne de télévision publique qu'il prônait un renforcement de la législation qui régule la liberté d'expression sur internet, ce qui inquiète énormément les défenseurs des droits de l'homme et la société civile au Pakistan.

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