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Tunisie: la rose de Kairouan, une source de revenus alternative pour les agriculteurs [1/3]

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En Tunisie, l’agriculture étouffée par une sécheresse inédite. Le pays, déjà enlisé dans la crise économique, fait aussi face à une crise de l’eau. La plupart des barrages du pays sont à sec ou connaissent un très faible niveau de remplissage. Pour tenter de faire face, les autorités ont instauré un système de rationnement et de coupures d’eau. Une situation de plus en plus difficile pour les agriculteurs. Dans un tel contexte, certaines cultures – moins consommatrices en eau – peuvent cependant constituer une source de revenus alternative. C’est le cas de la rose de Kairouan, une variété de fleur destinée à la parfumerie, aux cosmétiques ou à la pâtisserie. Elle est de plus en plus cultivée dans cette région du centre de la Tunisie où les températures ont atteint jusqu'à 48°C cet été.

En Tunisie, les rosiers peuvent constituer une source de revenus complémentaire pour les agriculteurs et les cueilleurs. (Image d'illustration)
En Tunisie, les rosiers peuvent constituer une source de revenus complémentaire pour les agriculteurs et les cueilleurs. (Image d'illustration) © Getty Images/iStock/Dreams
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De notre envoyée spéciale à Kairouan,

Sous un soleil de plomb, Dalanda Saddem apparaît au milieu des rangées de rosiers et d’oliviers. Avec son mari, elle gère une exploitation agricole d’un peu plus de six hectares. Le couple s’est lancé dans la culture de la rose, il y a sept ans.

« Au début, on a commencé par les cultures maraîchères, comme les petits pois », raconte-t-elle. « Mais ça demandait beaucoup de main-d’œuvre. Elle n’était pas toujours disponible parce que certaines interventions culturales coïncidaient avec la période de cueillette des olives qui rapportent plus. Pour garder les employés ici, il aurait fallu les payer plus cher. Nous avons donc voulu aller vers une autre culture qui demande moins d’entretien et moins de main-d’œuvre. »

Le rosier, une « culture à part entière »

À chaque printemps, pendant environ 30 jours, le couple recrute une vingtaine de femmes pour cueillir les roses. Sur le calendrier cultural, cette période de cueillette n’interfère avec aucune autre récolte. Le rosier peut donc constituer une source de revenus complémentaire, pour les agriculteurs et les cueilleurs. À la différence de ses ancêtres, Mohamed Chaker Saddem l’a bien compris.

« Mes parents et mes grands-parents cultivaient la rose n’importe comment. Ils plantaient les rosiers et les laissaient pousser de façon spontanée », explique-t-il. « Du coup, ça ne donnait pas grand-chose. Moi, je me suis documenté et formé. J’ai un calendrier précis à respecter : la taille, le binage, la récolte, l’irrigation… En fait, je traite le rosier comme une culture à part entière. Mes ancêtres, eux, le traitaient comme une culture marginale qui pouvait éventuellement apporter un revenu supplémentaire. Mais ce n’était pas leur cheval de bataille. »

Travailler et structurer la filière

Mohamed vend ses roses sur le marché, aux artisans de Kairouan ou aux industriels de Nabeul, pour la parfumerie, les cosmétiques ou la pâtisserie. Seul désavantage : la fluctuation des prix.

« Parfois, on a le sentiment de ne pas vendre nos roses au vrai prix », estime Mohamed. « Sinon, comment expliquer qu’en 2006-2007, on vendait le kilo à 7 dinars ? C’était très intéressant. Mais à l’époque, on n’était pas contents... Maintenant, en 2022-2023, le kilo peut se vendre beaucoup moins cher et parfois, les prix remontent. Il faut vraiment travailler sur la filière. »

Travailler sur la filière, la structurer, c’est l’un des principaux défis qui attend la région si elle veut pouvoir exploiter pleinement le potentiel économique que représente la rose de Kairouan. Pour les acteurs déjà engagés dans cette voie, nul doute : les perspectives pour l’emploi local pourraient être florissantes.

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