Une usine d’engrais à Gode: l’Éthiopie veut être autosuffisant et vise l’exportation
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Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed et l’homme d’affaires Aliko Dangote ont posé ensemble la première pierre d’une usine d’engrais à Gode, en région Somali. Si cette construction va de pair avec la stratégie d’expansion du milliardaire nigérian sur le continent, c’est « plus qu'une simple démonstration de croissance industrielle », selon les mots d’Abiy Ahmed. L’Éthiopie devrait, elle aussi, en tirer des bénéfices.

Avec notre correspondante à Addis-Abeba,
L’usine de Gode fera de l'Éthiopie le deuxième pays possédant une usine d'urée en Afrique – après le Nigeria. Objectif principal : assurer les immenses besoins en engrais du pays, où le secteur agricole emploie 70% de la population.
Jusqu’ici, tous les produits étaient achetés à l’étranger. Et pour l’Éthiopie, la facture est salée, déplore Mered Fikireyohannes, PDG du fonds d’investissements PAGA : « Un pays de 120 millions de personnes ne peut pas continuer à importer des engrais d’un montant de deux millions de tonnes chaque année et dépenser deux milliards de dollars, pour fournir ses agriculteurs. Ce n’est pas durable. Ces deux milliards de dollars peuvent être réinvestis dans le paiement du service de la dette, dans d’autres investissements. »
Si avec l’usine de Gode, l’Éthiopie va donc faire des économies, elle devrait aussi faire des recettes, en vendant le surplus de production à ses voisins. Une bonne nouvelle selon Mered Fikireyohannes. « Le besoin actuel local est de 2,5 millions de tonnes, et l’usine fabriquera 3,5 millions de tonnes. Le surplus sera exporté. L’Éthiopie fait partie de la zone de libre-échange africaine, donc nous pourrons vendre au Kenya, dans les pays voisins », estime le PDG. « C’est un business très lucratif », souligne-t-il.
Suffisance alimentaire et exportations
Avec cette structure, alimentée notamment par le gaz naturel de la réserve de Calub, à une centaine de kilomètres de Gode, l’Éthiopie espère aussi renforcer sa sécurité alimentaire. « Ça va permettre aux producteurs d'accéder à l'engrais à moindre coût, ce qui va agir ensuite sur le coût de production des produits locaux », estime Florent Toto, agro-économiste, spécialiste des politiques agricoles en Afrique.
« Ça va rendre le coût d'achat plus abordable, ainsi que le coût d'achat des produits finis, notamment de la nourriture pour la population. Donc, indirectement, ça va contribuer à la sécurité alimentaire », poursuit-il. Mais Florent Toto alerte aussi sur les risques d’utilisation des engrais chimiques, nocifs pour l’environnement en cas de mauvaise utilisation : « Utiliser les engrais, c'est bien, mais il va falloir les utiliser de manière rationnelle. Parce que si on fait l’épandage massif des engrais et sans précision, ça peut agir sur la pollution des nappes phréatiques et ça peut aussi agir sur les sols. Et à long terme, ce sont les agriculteurs qui seront perdants. » Le montant total de la construction de l’usine de Gode s’élève à 2,5 milliards de dollars.
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