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En Côte d'Ivoire, l'ancienne boucle du cacao se tourne vers l'anacarde

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Alors que la campagne de commercialisation du café et du cacao est lancée depuis le début du mois d’octobre dans la région du N’Zi, l’activité tourne au ralenti. Le cœur historique de l’ancienne boucle du cacao, qui pesait près d’un quart de la production ivoirienne au début des années 1970, produirait désormais moins de 2% du total national. La faute à une baisse des rendements, aux multiples causes. Les planteurs se sont tournés vers d’autres cultures comme l’anacarde.

Une cabosse prélevée sur un arbre de la plantation de Kongossou, en Côte d'Ivoire.
Une cabosse prélevée sur un arbre de la plantation de Kongossou, en Côte d'Ivoire. © Benoit Almeras/RFI
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De notre envoyé spécial à Dimbokro, 

Elles faisaient la fierté des villageois de Kongossou – les plantations de cacao. Les cabosses sont rares ces jours-ci. À l’ombre des arbres, Kouamé N’dri en désespère : « Ce qui a changé, c’est qu’il ne pleut plus. Avant, il pleuvait très bien, toutes nos forêts qu’on avait, elles sont petites maintenant. » La production varie de 50 à 300 kilos, très peu donc. « Mais le cacao, on gagne notre vie avec, on espère que ça va venir encore », ose encore croire le producteur. Le planteur n’envisage pas d’abandonner la tradition cacaoyère de ses grands-parents qui ont, eux, vécu la grande époque de Dimbokro.

Il y a cinquante ans, l’ex-capitale ivoirienne du cacao était florissante, en témoignent ses anciens entrepôts ou encore le chemin de fer qui reliait la ville au port d’Abidjan. Le déclin s’est amorcé au début des années 1980 avec le vieillissement des plantations, la déforestation et les sécheresses, entre autres. « Le fait qu’il y a déforestation, le fait que la pluviométrie utile diminue, tout cela fait que les rendements diminuent puisque la rente forêt qui était un des facteurs de productions a disparu. Donc, les coûts de production augmentent et donc les planteurs, s’ils ont la possibilité d’aller chercher une nouvelle forêt, ils vont préférer ça plutôt que d’essayer de replanter dans la vieille plantation », détaille François Ruf, agro-économiste, spécialiste du cacao.

Changement de culture

La boucle du cacao s’est depuis déplacée vers l’ouest. Toungbo dirige l’une des anciennes coopératives de Dimbokro. Il témoigne de cette migration rurale. « Les planteurs qui étaient à Dimbokro sont partis vers Soubré, Gagnoa quand le changement climatique est arrivé et que là-bas c’était la véritable forêt. Donc, ils y sont allés », décrit-il. « Si vous allez là-bas, vous allez trouver des campements appelés « Petit Dimbokro », donc c’est ça qui fait la fierté de la région là-bas », précise-t-il encore.

Les planteurs qui sont restés se reconvertissent – palmier à huile, hévéa, entre autres. L'une des principales alternatives est l’anacardier importé des savanes du Nord. La région du N’zi aurait produit plus de 4 000 tonnes de noix de cajou en 2023. Séraphin Koffi Ngoran en a planté quatre hectares. « Ça a été une lueur d’espoir. On a planté, certains parents nous disaient que c’étaient des bois du Nord, mais aujourd’hui ces bois du Nord nous profitent et nous apportent de la richesse », se souvient-il. L’anacardier a l’avantage d’avoir moins besoin de pluie, « c’est plus facile à faire pousser », selon Koffi Ngoran. À 425 francs CFA le kilo, la noix de cajou ne remplace pas la fève de cacao, six fois plus chère, dans le cœur des planteurs. Séraphin veut faire pousser des cacaoyers entre ses anacardiers.

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