Pourquoi donc le privilège de représenter le continent au sein du Conseil de sécurité devrait-il être réservé aux seuls grands pays, alors que de petites nations sérieuses serviraient davantage l'intérêt de tous !

Lors d’un dialogue en ligne, initié par le Parti communiste chinois, le président Cyril Ramaphosa d’Afrique du Sud a réaffirmé, ce 15 mars 2023, la nécessité d’une réforme des Nations unies, avec un siège permanent pour l’Afrique au Conseil de sécurité. Le continent peut-il raisonnablement nourrir quelque espoir de voir aboutir cette revendication, plutôt ancienne ?
Depuis un quart de siècle, au moins en effet, les Africains réclament cette réforme et ce siège permanent, mais dans une relative cacophonie, et en vain, jusqu’à présent. Ils ne se sont pas réellement donné les moyens d’impulser les changements qui auraient pu leur offrir une telle perspective au sein de l’Organisation internationale. Car, pour être audible, il faut exister, de manière cohérente et convaincante. Or, quoique plaisante sur le papier, l’idée d’un siège permanent pour l’Afrique au Conseil de sécurité n’a nullement été confortée par une aptitude de l’Afrique à s’imposer comme un bloc homogène, une entité solide.
L’Union se déchirerait, si elle devait s’entendre sur la nation qui porterait sa voix au Conseil de sécurité. Et chacun des pays qui se considère aujourd’hui comme grand et important sur le continent croit que ce siège devrait lui revenir naturellement. L’Afrique du Sud, le Nigeria, et quelques autres s’y voient, sans qu’un seul puisse se prévaloir d’un leadership consistant et convaincant, dans la constance, ces dernières décennies.
Dans ce cas, il ne resterait donc plus qu’à déterminer, à l’Union africaine, les critères précis à remplir pour mériter ce siège…
Et c’est alors que l’UA pourrait voler en éclats. Autant, pour certains, l’état de droit et la démocratie semblent être des gages clairs de crédibilité, autant, pour d’autres, il serait préférable d’intégrer des considérations moins… contraignantes, voire futiles. Parlez-leur de systèmes politiques à la crédibilité avérée, de processus fiables de désignation des dirigeants, et la plupart s’emporteront.
Quant aux marqueurs possibles du vote de ce membre permanent africain au Conseil de sécurité, nul n’y pense. Agira-t-il en son âme et conscience, ou sur les directives express de l’UA ? Qu’aurait-il fait, par exemple, dans le contexte actuel, sur une résolution du Conseil sur la guerre russe en Ukraine ? L’Afrique est tellement divisée, sur tout, que, dans ce siège permanent, elle pourrait être réduite à souscrire un abonnement pour l’abstention. Et donc, faire de la figuration, comme du temps où elle n’avait rien. Le pire, pour les peuples, serait que le continent obtienne ce siège, avant de commencer à songer à l’usage qu’il compte en faire concrètement.
Les membres permanents du Conseil de sécurité ne sont pas tous des modèles de démocratie ou de respect des droits de l’homme…
Dans bien des domaines, l’Afrique a encore de sérieux progrès à faire, en effet. Il n’empêche que les peuples voudraient voir la nation qui parlerait en leur nom se distinguer par certains grands principes, certaines valeurs. Tous voudraient être représentés par des dirigeants dignes, dont la légitimité ne souffre d’aucune contestation, et qui soient capables de garder la tête haute.
Regardez donc la disparité des profils des chefs d’État qui ont dirigé l’Afrique du Sud, depuis le départ du pouvoir de Nelson Mandela, en 1999 ! Le Nigeria, sur la même période, s’illustre de manière tout aussi lugubre, dans l’inconstance, avec un leadership d’égale inconsistance. Ici et là, ces mêmes dirigeants qui ignorent superbement la xénophobie de leurs concitoyens à l’égard d’autres fils du continent sont ceux qui prétendent vouloir porter la voix de toute l’Afrique au Palais de verre de Manhattan.
Si seulement ces mastodontes pouvaient accepter de céder la place à un de ces pays, petits par la géographie, mais qui affichent des systèmes politiques respectables, et un leadership sérieux et crédible, sur la durée ! À la différence des soi-disant grands pays, ces « petites » nations sérieuses savent prendre en compte l’intérêt général, et n’ont pas cette fâcheuse tendance à tout ramener à leurs seuls intérêts.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne