Taxe sur le cuivre, un projet de loi qui fait polémique au Chili
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Au Chili, l’Assemblée vient d’adopter un projet de loi pour augmenter la taxation du lithium et du cuivre. Il reste encore un vote au Sénat, mais le sujet fait déjà du bruit chez le premier producteur mondial de métal rouge.
Le débat n’est pas nouveau et pourrait encore durer plusieurs mois au Chili. Le projet de loi doit encore passer au Sénat et les autorités se disent prêtes à user de tous les recours possibles pour bloquer son adoption.
Le texte qui fait polémique prévoit l’instauration de taxes plus élevées via des royalties sur les ventes de cuivre, suivant un barème indexé sur les cours du marché. Des taxes qui pourraient couter cher aux compagnies, dans une période comme aujourd’hui où les prix atteignent des sommets.
Au Chili, le cuivre est un des piliers de l’économie. Mais cette rente n’a pas permis de réduire les inégalités. En 2019 selon Business France - structure publique qui soutient le développement des entreprises françaises à l’international - 1 % des plus riches concentraient 33 % de la richesse du pays.
Des miniers menacent déjà de ne plus investir dans le pays
D’où le lancement par la gauche en 2018 d’une réforme du mécanisme de taxation qui serait profitable aux habitants, et à la protection de l’environnement en zone minière. Une stratégie qui ne surprend pas Yves Jegourel, président de l'association Commodities for Nations et professeur a l’Université de Bordeaux. « Le lien entre la réglementation et la dynamique des marchés est commune à toutes les matières minérales, la hausse des cours provoque généralement une hausse des taxes ». Mais cet analyste en matières premières reste sceptique sur l’idée d'imaginer « nourrir du développement sur des recettes minières ».
Le gouvernement conservateur du président Sebastian Pinera est lui vent debout contre cette taxe, car il craint un effet dévastateur pour l’économie. Et il n’a peut-être pas tort : le porte-parole du groupe qui exploite la mine d’Antucoya - Antofagasta Minerals - a déjà fait savoir que les activités de la mine seraient suspendues si le projet de loi était adopté. L’ancien président de la Codelco la société publique, qui produit 30 % du cuivre chilien, a lui aussi prévenu que la mesure ne serait pas tenable pour le secteur.
Un projet de loi horizon 2024
« Si la loi passe cela pourrait être un sacré bazar », confirme Mathieu Le Guérinel analyste au Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) qui évoque la possibilité de voir des compagnies partir au Pérou, deuxième producteur de métal rouge, d’autant que plusieurs mines chiliennes arrivent à maturité et vont requérir de gros investissements pour continuer à être exploitées.
« On ne va pas substituer le Chili comme cela », rassure de son côté un expert matières premières. Ses réserves mondiales de cuivre - 25 % en 2017 selon le BRGM - sont sans pareil et c’est ce qui rend le pays incontournable.
La loi elle, si elle est adoptée, n’entrera en vigueur qu’en 2024, après l’arrivée à échéance du pacte de stabilité signée entre les autorités et les miniers. Mais avant cela « cette histoire risque de faire bondir les prix » prédit un sous-traitant minier basé sur le continent africain. Ce qui ferait des heureux notamment en République démocratique du Congo où une des futures plus grandes mines de cuivre du monde devrait entrer en exploitation dans les prochaines semaines.
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