Chronique des matières premières

L’exploitation des terres rares et de l’uranium, enjeu électoral au Groenland

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C'est ce mardi jour d'élection au Groenland. Élections municipales et législatives. Et parmi les enjeux de ces scrutins locaux, il y a l'exploitation du sous-sol et notamment d’une mine mixte uranium-terres rares. Ce que l’on appelle terres rares, ce sont 17 métaux qui ne sont pas rares, mais très prisés par le secteur de la défense, et l'industrie automobile.

Une ancienne colonie minière à Qulissat au Groenland. (Photo d'illustration).
Une ancienne colonie minière à Qulissat au Groenland. (Photo d'illustration). De Agostini via Getty Images - DEA / M. SANTINI
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C'est un sujet qui fait polémique depuis des années au Groenland. Pour des questions de souveraineté et d'environnement notamment, l'exploitation des terres rares étant très polluante. Mais aussi parce que le projet majeur d’exploitation de terres rares est lié à l’extraction d’uranium sur le même site.

Si le parti groenlandais qui n'est pas favorable à l'exploitation de l'uranium gagne le scrutin de ce mardi, le projet minier de Kvanefjeld site mixte uranium-terres rares pourrait ne plus être d'actualité – l'australien Greenland Minerals dans lequel le chinois Shenge Resources a une participation est prépositionné pour exploiter ce projet.

Un changement de politique affecterait également le groupe français Orano, titulaire de deux permis d'exploration de gisements d’uranium, ailleurs, au sud du Groenland toujours. Les tensions sont telles que les réunions publiques de ces derniers mois sur la mise en exploitation du site de Kvanefjeld ont été pour certaines très perturbées.

Le Groenland, mine de terres rares lourdes

Ce projet est situé dans une région agricole et touristique. Et « c'est notamment parce que le marketing de la région en prend un coup que le sujet fait autant débat », explique Damien Degeorges, consultant à Reykjavik et auteur de Terres rares : enjeu géopolitique du XXIe siècle aux éditions L'Harmattan.

Le Groenland, c'est 56 000 habitants seulement, une économie très réduite, alors les petits projets et a fortiori les grands peuvent avoir un impact immense qui touche très vite aux questions sécuritaires.

L'intérêt du Groenland, c'est qu'on y trouve des terres rares lourdes, celles qui sont plus chères à extraire, qui servent à l'industrie militaire et qui sont aujourd'hui essentiellement produites par la Chine. L'empire du milieu est leader du secteur avec 70% de la production globale de terres rares, et leader pour la transformation de ces métaux en aimant.

Les États-Unis ont relancé leur production de terres rares dans la mine de Mountain Pass, en 2018, mais ils expédient toute leur production envoyée en Chine, faute de pouvoir la traiter sur place. Une réflexion est en cours pour rouvrir des sites de traitement qui avaient été fermés, au Texas notamment et réduire ainsi la dépendance à la Chine.

La Chine tient toujours les rênes

Pour certaines terres rares dont l'usage n'était pas indispensable, c'est le cas des ampoules, des substituts ont été trouvés, mais pour l'éolien – un aimant se trouve dans le moteur du mécanisme – ou la voiture électrique c'est plus compliqué. Si Renault a réussi à mettre au point un moteur sans terres rares, « il faut cependant s'attendre à une explosion de la demande » selon John Seaman chercheur à  l'IFRI – Institut français pour les relations internationales.

« Le marchandage avec la Chine reste donc pour l'instant incontournable sur le sujet, estime t-il, à moins de trouver plus de substituts ou de développer plus de projets miniers hors de Chine... ». Comme c'est le cas désormais en Birmanie et demain peut-être au Groenland.

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