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Victor Jestin, le jeu c’est sa came

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Un soir, en rentrant, Maud, joue sur son téléphone en conduisant. Soudain, c’est l’accident. Maud prend la fuite. Apercevant l’enseigne lumineuse d’un bowling, elle s’y réfugie. Et elle replonge. Le roman «La mauvaise joueuse» déroule sur un rythme effréné le terrible engrenage de l’addiction au jeu.

C’est dans le bowling d’une zone commerciale que débute la spirale infernale qui va emporter Maud.
C’est dans le bowling d’une zone commerciale que débute la spirale infernale qui va emporter Maud. © Istock/Zoran Zeremski
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Victor Jestin le dit d’emblée : « je suis concerné ». Si La mauvaise joueuse est écrit à la première personne, il s’agit donc bien d’un roman en partie autobiographique, même si le « je » du jeu est une femme.

Maud -c’est ainsi qu’elle se prénomme-, une trentenaire comptable près de Nantes, vit avec un compagnon qu’elle aime, sans souci particulier : le couple envisage même d’avoir un enfant. Son seul véritable souci : l’addiction au jeu, et même aux jeux au pluriel, car elle aime les jeux de toutes sortes. Le lecteur s’en rendra compte en dévorant ce roman qui démarre sur les chapeaux de roue et qui avance à toutes vitesse, entraînant l’héroïne dans une irrépressible fuite en avant aussi inexplicable qu’incontrôlable après un accident de voiture dont les conditions restent assez floues. Si ce n’est que son addiction au jeu en est largement responsable.

De rencontre en rencontre, la jeune femme passera ces trois jours de cavale aux airs d’infernal tourbillon à jouer. Peu importe à quoi, d’ailleurs tout y passe : bowling, jeu vidéo, football, échecs, Monopoly et même stand de tir à la fête foraine… Toutes les occasions sont bonnes pour assouvir son désir de jouer. Même si le sentiment de culpabilité l’assaille, elle ne peut tout simplement pas s’en empêcher.

En France, les addictions aux jeux de hasard et d’argent et celles aux jeux vidéo sont aujourd’hui des addictions comportementales, reconnues comme une maladie. Selon les chiffres de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, 4.9% des Français ont été classés comme « joueurs problématiques » parmi les pratiquants de jeux d’argent et de hasard. En moyenne, 3% des Français présenteraient un risque d’addiction aux jeux vidéo (gaming disorder).

Chez Maud, cette passion du jeu remonte à l’enfance, dans un petit village imaginaire de l’ouest de la France que Victor Jestin a joliment appelé Ludeaux. C’est là que le père de Maud lui a transmis sa passion du jeu. Ses valeurs aussi, à commencer par le respect des règles : devenue adulte, Maud ne supporte d’ailleurs toujours pas les tricheurs, et prend toujours au sérieux. Pour elle, l’important n’est pas de participer, mais de faire de son mieux, de se dépasser et de dépasser les autres, bref de gagner, comme si sa vie en dépendait. Elle en a récolté cette réputation de « mauvaise joueuse » qui donne son titre au roman. Un livre trépidant, entre action et introspection, qui interroge sur notre rapport à l’existence : la vie n’est-elle pas un jeu ?

La mauvaise joueuse, Victor Jestin (Flammarion).

Victor Jestin confesse que pour l’écrivain qu’il est, l’écriture aussi est un jeu.
Victor Jestin confesse que pour l’écrivain qu’il est, l’écriture aussi est un jeu. © Jean-Philippe Baltel/Éditions Flammarion

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