L'Atelier politique

Guillaume Bigot : «C'est un crépuscule de la classe dirigeante française»

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Le député RN du Territoire de Belfort dénonce un «spectacle lamentable» à l'Assemblée, salue la méthode Trump au Proche-Orient et met en garde contre l'identité numérique européenne. Invité de l’Atelier Politique, il répond aux questions de Frédéric Rivière.

Guillaume Bigot, député RN du Territoire de Belfort.
Guillaume Bigot, député RN du Territoire de Belfort. © RFI
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«Un trou au milieu» de l'Assemblée

Sur le vote de confiance dont a bénéficié Sébastien Lecornu, Guillaume Bigot dresse un constat sévère : «Ce qui m'a beaucoup frappé, c'est que les bancs de l'Assemblée étaient vides. Il y avait les députés de la France insoumise, nos députés et ceux d'Éric Ciotti. Et puis il y avait un trou au milieu.»

Ce «trou», selon lui, est composé «des LR, du Parti socialiste et du bloc central qui ne sont finalement d'accord que sur une chose : ne pas revenir devant les citoyens. Et ils n'assumaient même pas cette position.»

Une «arnaque» sur les retraites

Le député RN anticipe l'échec de la suspension promise de la réforme des retraites : «Le Parti socialiste sait pertinemment que le véhicule juridique choisi par le gouvernement suppose que l'intégralité du projet de loi de financement de la Sécurité sociale soit adopté, avec notamment le gel des pensions de retraite.»

«Ils savent pertinemment que c'est pour gagner quelques mois, pour ne pas se retrouver devant les électeurs», assène-t-il. «L’arnaque de la suspension va éclater au grand jour, ça ne saurait tarder.»

La stratégie RN : vers la dissolution

«On est simplement dans la même consternation que la plupart de nos concitoyens. On ne comprend pas pourquoi il y a une impossibilité d'obtenir une rupture avec une politique qui est un peu la même depuis 1981», déplore le député.

Il évoque deux scénarios : «Soit le président de la République démissionne et il y a une nouvelle élection présidentielle, soit il y a une dissolution et on peut dégager une majorité.»

Sur la censure, il précise : «On est à 18 voix de la censure. Il suffit que 18 personnes changent d'avis au sein de l'Assemblée nationale.»

 

Trump au Proche-Orient : un «succès incontestable»

Sur l'accord de Gaza, Guillaume Bigot salue sans réserve : «C'est une victoire éclatante pour la diplomatie américaine et pour Donald Trump, c'est incontestable.»

Il détaille la méthode : «Il a cassé le bras de Netanyahu. Il a dit à Israël : si tu continues à massacrer des civils à Gaza, tu n'as plus d'armes. Il est allé voir le Hamas en passant par le Qatar et la Turquie pour dire : si vous n'acceptez pas les conditions, ce n'est pas seulement Tsahal qui va vous bombarder, c'est l'armée américaine

 

Une diplomatie «cash» et «réaliste»

«Pour imposer la paix, il faut la force. Pour avoir une diplomatie digne de ce nom, il faut être capable d'exercer le rapport de force», analyse-t-il, citant Bismarck : «Une diplomatie sans armée, c'est un orchestre sans instrument.»

Il oppose cette méthode au multilatéralisme : «C'est l'inverse de la méthode qu'adorent vanter les Européens et Emmanuel Macron. On fait des grand-messes, on se met d'accord sur le fait que le cancer ça tue, qu'il faut protéger les enfants. Tout le monde signe, ça n'engage à rien.»

 

Ukraine : Trump moins puissant face à Poutine

Sur la guerre en Ukraine, le constat est plus nuancé : «Trump n'a pas du tout le même pouvoir à l'égard de Vladimir Poutine qu'il peut avoir à l'égard de Netanyahu. Il a ce pouvoir à l'égard de Zelensky, qu'il n'a pas hésité à humilier pour le forcer à s'asseoir à la table de négociations.»

«Mais pour faire la paix, il faut être deux. Il n'a aucun levier de chantage sur la Corée du Nord, sur la Chine, sur les amis du Sud global de Poutine», tempère-t-il.

 

Les leçons du Népal et de Madagascar

Sur le renversement des gouvernements du Népal et de Madagascar, Guillaume Bigot tire des enseignements : «Les réseaux sociaux sont un outil de mobilisation en rhizome, sans centre. Pour les autorités qui veulent contrôler, c'est extrêmement compliqué parce que c'est polycentrique.»

«On voit que la répression n'a pas bloqué la furie de la foule. Au contraire, elle l'a décuplée», analyse-t-il. «C'est quand un pouvoir devient sourd et aveugle à la majorité de son peuple. Le cavalier va être renversé quoi qu'il arrive.»

Son message aux dirigeants : «Vous ne pouvez pas aller contre la majorité de votre population, vous ne pouvez pas vous acharner. Ça n'a juste aucun sens.»

 

L'identité numérique : une menace pour les libertés

Sur le portefeuille numérique européen prévu pour novembre 2026, Guillaume Bigot exprime ses craintes : «C'est un QR code qui connecte votre pièce d'identité à votre carte vitale, votre permis de conduire, vos diplômes, vos ordonnances, votre carte électorale.»

Son inquiétude : «Si ce n'est pas sous le contrôle des juges et d'un pouvoir démocratique, c'est terrifiant. Et jusqu'à preuve du contraire, l'Union européenne n'est pas démocratique.»

Il cite le projet «Chat Control» : «Une intelligence artificielle européenne allait pouvoir accéder à toutes les messageries cryptées pour lutter contre la pédocriminalité. Mais à partir du moment où il n'y a pas de contrôle du juge et où des autorités non élues peuvent avoir accès à toutes vos communications, c'est George Orwell. »

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