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Milipol, le début du retour en grâce d'Israël dans le commerce de la défense

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Milipol, le salon de la sûreté et de la sécurité intérieure ouvre ses portes aujourd’hui près de Paris pour quatre jours. C’est le plus important rendez-vous du genre dans le monde. Les entreprises israéliennes du secteur ont été autorisées à exposer.  

Un fusil d'assaut bullpup VHS-K2 (canon court) est présenté sur le stand de l'Agence croate Alan lors du salon mondial de la sécurité intérieure (MILIPOL) à Villepinte, au nord de Paris, le 14 novembre 2023.
Un fusil d'assaut bullpup VHS-K2 (canon court) est présenté sur le stand de l'Agence croate Alan lors du salon mondial de la sécurité intérieure (MILIPOL) à Villepinte, au nord de Paris, le 14 novembre 2023. © AFP - MIGUEL MEDINA
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C’est Emmanuel Macron qui a pris la décision. Et pourtant lors des précédents salons du secteur de l’armement organisés en France, comme le salon de Bourget de cette année ou Eurosatory au printemps 2024, les entreprises israéliennes avaient été exclues pour cause de guerre à Gaza. Elles n’avaient pu participer à Euronaval à l’automne de la même année qu’après décision de justice. L’Élysée explique que la doctrine sur la participation des entreprises israéliennes aux salon du secteur de la défense n’a pas changé. Mais pour la présidence « cette décision a pour objectif de contribuer à un dialogue constructif avec les autorités israéliennes sur tous les sujets relatifs à la paix au Proche-Orient et à nos relations bilatérales ». Des relations bilatérales qui sont notoirement dégradées depuis la reconnaissance par la France de l’état palestinien. Israël continue de dire qu’un tel État n’existera jamais.  

Un cessez-le-feu fragile

Volonté de dialogue donc, mais la France justifie aussi sa décision par le changement dans la situation sur le terrain et le cessez-le-feu. C’est aussi la justification avancée par le gouvernement allemand pour annoncer la reprise de ses livraisons d’armes à Israël. Ce n'est sans doute pas le dernier pays à le faire, Mais l’Allemagne est le deuxième fournisseur d’armes à Israël après les États-Unis, qui eux n’ont jamais cessé leur commerce. Donald Trump estime que le cessez-le-feu tient. C’est sans doute faire preuve d’optimisme et de volontarisme. Et c'est la raison pour laquelle les États-Unis se sont empressés de faire valider leur plan de paix par une résolution du conseil de sécurité des Nations unies la nuit dernière. Car en fait, le cessez-le-feu tient, sauf quand il est suspendu, en particulier par Israël. Depuis son entrée en vigueur, il y a moins d'un mois et demi, il y a déjà eu des dizaines de morts du fait de bombardements israéliens. Tout cela suit une guerre qui depuis le 7 octobre 2023 a fait plus de 1200 morts côté Israélien et près de 70 000 côté palestinien selon des chiffres gazaouis jugés fiables par les Nations unies. Sans compter les violences de l’armée et des colons en Cisjordanie, qui au total ont fait des centaines de mort depuis deux ans. Il n’est donc pas interdit de penser que ce retour d’Israël dans le commerce international de la défense est peut-être un peu rapide.  

Raisons de s'interroger

D’autres pays ne vont pas aussi vite. Et sur tous les continents. L’Espagne a officialisé début octobre son embargo de fait sur les exportations et les importations d’armes à destination d’Israël, « pour mettre fin au génocide », précise le texte adopté. L’Afrique du Sud dénonce une volonté orchestrée d’expulser les Palestiniens de Gaza après que plus de 150 d’entre eux sont arrivés sur son territoire par avion dans des circonstances pour le moins opaques. C’est une plainte sud-africaine qui a conduit la Cour internationale de justice à parler de risque plausible de génocide à Gaza. Sans que cela entraine de réaction forte de la part des pays signataires de la convention pour la prévention du génocide et qu’ils sont censés faire appliquer. Il y a donc encore de fortes raisons de s’interroger, mais le climat géopolitique et l’augmentation généralisée des dépenses dans la sécurité et l’armement expliquent sans doute l’empressement des acteurs économiques et étatiques du marché à tourner la page.

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