Questions d'environnement

Pourquoi l'air de New Delhi est-il aussi irrespirable ?

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Depuis plusieurs jours, la capitale indienne suffoque au milieu d'un brouillard jaunâtre et toxique. La qualité de l'air est tellement mauvaise que les écoles sont fermées toute cette semaine pour protéger les enfants dont les poumons sont en plein développement.

La circulation se fait au milieu d'une chape de smog, causée par un mélange de pollution et de brouillard à New Delhi, en Inde, le jeudi 18 novembre 2021 (Image illustration).
La circulation se fait au milieu d'une chape de smog, causée par un mélange de pollution et de brouillard à New Delhi, en Inde, le jeudi 18 novembre 2021 (Image illustration). © AP - Altaf Qadri
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La mégalopole de New Delhi, et ses 30 millions d'habitants, est régulièrement classée parmi les villes dont l'air est le plus pollué au monde. Mais à l'arrivée de l'hiver, début novembre, cela devient encore plus critique. À cette époque, les paysans des États voisins, situés au nord de l'Inde, brûlent les tiges de riz desséchées qui restent dans leurs champs après la récolte. Les vents portent ces nuages de fumée vers la capitale et le froid bloque la pollution au sol.

« Là, je viens de monter quelques marches dans l'escalier et, vous devez l'entendre, je suis toute essoufflée, témoigne Bahvreen Kandhari auprès de RFI, ce n'est pas normal ». Cette mère de famille a fondé le collectif « Mamans guerrières » pour lutter en faveur d'un air propre pour les enfants. « Mes yeux me grattent et tous les gens autour de moi ont, soit mal à la tête, soit ils toussent. Les hôpitaux sont pleins de patients qui souffrent d'asthme et de problèmes pulmonaires », poursuit-elle.

Ce dimanche à New Delhi, le niveau de particules fines - ces microparticules cancérigènes qui pénètrent les poumons et le sang -  était 40 fois supérieur au maximum fixé par l'Organisation mondiale de la santé.

La célébration, dans les prochains jours, de Diwali, la fête des lumières, ne devrait pas arranger les choses car des milliers de pétards sont traditionnellement tirés dans la ville.

Voilà pour les raisons ponctuelles de cette pollution. Mais le reste de l'année, la situation n'est pas meilleure. À Delhi, l'air est pollué en permanence et depuis plusieurs décennies, par le trafic routier phénoménal, par les industries et notamment les nombreuses centrales à charbon dont dépend le pays pour se fournir en énergie, mais aussi par toutes les nouvelles constructions qui dégagent de la poussière et par les déchets qui sont souvent brûlés.

« Air-pocalypse »

Face à cet « air-pocalypse », selon les termes du ministre de l'Environnement local, les autorités suspendent ponctuellement les travaux de construction, interdisent la circulation de certains véhicules. Il existe une application mobile pour dénoncer les contrevenants. Et depuis le mois d'octobre, la capitale s'est même dotée d'un centre de coordination de haute technologie baptisé la « salle de guerre verte ». Sur des écrans géants et des images satellites, des experts scrutent l'évolution de la pollution de l'air et envoient des équipes sur le terrain pour éteindre des incendies de décharge ou avertir des entreprises qui polluent.

« C'est positif pour freiner les gros épisodes de pollution, analyse Sunil Dahiya, du Centre de Recherche sur l'Énergie et l'Air Propre (CREA), mais ces mesures ne s'attaquent pas aux causes profondes de la pollution de l'air ».

Dépendance au charbon et lobby agricole

« Le secteur des transports incite encore à utiliser des véhicules individuels. Cela veut dire toujours plus de consommation de fuel, et plus d'émissions, détaille l'expert. Et en Inde, 70 % de l'électricité vient du charbon. Donc plus nous consommons, plus il y a d'émissions de polluants, et c'est pareil aussi pour l'industrie ».

Le résultat est sans appel : ce cocktail toxique fait perdre dix ans d'espérance de vie aux habitants de New Delhi. Mais l'Inde ne veut pas freiner son développement et les autorités rechignent à froisser l'important lobby d'électeurs que représentent les paysans.

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