Comment la gourde est-elle devenue un emblème de la transition écologique?
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Elle remplace la bouteille d'eau en plastique jetable. Devenue tendance, la gourde est-elle pour autant exemplaire pour l'environnement ?

Elle fait peut-être partie de vos souvenirs d'enfance et vous accompagnait dans vos sorties, en camping ou en colonie de vacances : une gourde en plastique qui coulait dans le sac et qui donnait à l'eau ce goût inoubliable de plastique et de renfermé. Mais l'histoire de la gourde n'a pas commencé avec votre enfance. Elle est presque aussi vieille que l'humanité, parce que l'eau est vitale, et qu'il fallait bien la transporter : très tôt les Hommes ont fabriqué des gourdes en peau d'animal, en calebasse, en céramique pour les plus chics.
Et puis est arrivée l'invention du plastique. Pire encore, du plastique jetable. Il y a dix ans, le nombre de bouteilles en plastique vendue dans le monde, en une année, frôlait les 500 milliards (1 million chaque minute), sans compter l'eau qu'on vend en sachet plastique. Mais seulement 15% du plastique est recyclé à l'échelle planétaire. Le reste part en fumée, ou pire encore, dans les mers et les océans où il y a aura bientôt sans doute plus de plastiques que de poissons.
Gourdes de luxe
La pollution plastique est alors devenue un sujet de préoccupation, et peu à peu la gourde s'est imposée comme un objet écologique : l'écologie du quotidien, des petits gestes. Un Français sur deux l'aurait adoptée. Les salariés de RFI ont eu droit à leurs petites gourdes en plastique recyclé. La gourde est devenue à la mode, est même devenue un accessoire de mode, de toutes les couleurs, toutes les matières, personnalisable. La gourde est aussi devenue un marqueur social. Même les plus grandes marques de luxe se sont mises à vendre des gourdes à leur effigie, évidemment hors de prix. Alerte spoiler : l'eau y a le même goût.
Une gourde est écologique à condition de ne pas en acheter une tous les six mois, ou de ne pas la stocker dans son placard. Un symbole de sobriété peut vite devenir un symbole de consommation. Boire dans sa gourde plutôt qu'en bouteille jetable permet d'éviter 3 à 5 kilos de déchets par an, et quelques kilos de CO2.
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Rentable après plusieurs années
Une gourde, il faut la rentabiliser d'un point de vue écologique, et c'est là que les choses peuvent se gâter. Parce que quand elle arrive en magasin, la gourde a déjà son empreinte carbone (transport, fabrication), plus ou moins élevée selon le matériau choisi. Les meilleures gourdes sont en inox, un matériau sans danger, qui ne se désagrège pas avec le temps, qui est solide. Mais pour l'amortir, il faut l'utiliser exclusivement pendant au moins 3 ans, et même 6 ans si vous avez craqué pour la version isotherme. Sauf qu'en moyenne, en France, on compte deux gourdes par personne, et qu'on en change tous les deux ans.
Le problème de la gourde, c'est aussi qu'il faut la remplir (et la porter...). Et quand il n'y a pas d'eau potable ou quand il n'y a pas d'eau du tout, ce qui est le cas pour 10% des habitants de la planète, la gourde perd un peu de son intérêt. À Paris, n'espérez pas remplir votre gourde facilement. Les fontaines publiques, sacrifiées au XXe siècle sur l'autel de la modernité, reviennent peu à peu mais il faut bien les chercher. Dans les cafés, on pourra vous facturer le plein d'eau. Et si vous visez un McDo, déjà il faut trouver le code des toilettes, et l'eau qui coule du robinet est chaude – parce qu'il faut bien vendre du coca dans des gobelets en plastique...
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