Vietnam: pourquoi l'eau salée remonte dans les champs?
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Trois milliards de dollars, c'est la perte annuelle estimée au Vietnam selon les autorités. Le secteur agricole du pays souffre de pertes de récolte en raison de la remontée d'eau salée dans le delta du Mékong. Les rizières sont particulièrement touchées. La sécheresse, la montée des eaux, tout cela contribue à ce phénomène, pas inédit, mais qui prend de plus en plus d'ampleur.
Le pays est confronté à une vague de chaleur anormalement longue, qui s'étire depuis février et qui s'accompagne d'une sécheresse. À l'heure où on parle, il fait ainsi 34 degrés dans la région. Conséquences, les nappes phréatiques sont vides, et l'eau de mer peut s'y infiltrer. Ce n'est pas inédit, mais avec la sécheresse particulièrement prononcée, la montée du niveau de la mer, et le manque d'eau douce provenant de l'amont, on atteint en effet une ampleur inédite.
De lourdes conséquences sur le secteur agricole
Les derniers chiffres communiqués par le ministère de l'Environnement du Vietnam évoquent près de 14 % des récoltes de riz touchées et près d'un tiers des arbres fruitiers, alors que la région fournit plus de la moitié du riz du pays et 80 % de ses fruits.
Une fatalité ?
Ça va être en effet très compliqué de s'adapter à ce phénomène. Le delta du Mékong n'a que 80 cm d'altitude moyenne, selon les projections, la montée des eaux en submergerait une grosse moitié, d'ici la fin du siècle. C'est une tendance de fond à laquelle on ne peut pas y échapper.
Mais il y a en plus d'autres phénomènes qui aggravent la situation, car non seulement le niveau de la mer augmente, mais en plus le sol s'affaisse, jusqu'à 5 cm par an par endroit. En cause notamment, le pompage des eaux souterraines.
L'intensification de l'agriculture dans le delta nécessite beaucoup d'eau, près de 3 millions de mètres cube par an, c'est deux fois plus que la capacité de recharge naturelle des nappes phréatiques. Si on cumule les deux phénomènes, montée des eaux et affaissement, on projette que la quasi-totalité du delta sera submergée d'ici la fin du siècle.
Et puisque le tableau n'est pas assez sombre, il y a un troisième problème. C'est cette fois l'intrusion d'eau salée, non pas dans le sous-sol, mais dans les cours d'eau de surface. La sécheresse réduit leur débit, ce qui facilite la remontée en amont d'eau de mer, mais le phénomène est encore une fois amplifié par l'activité humaine.
En cause cette fois, l'extraction de sable dans le lit des cours d'eau. Les volumes ont explosé avec l'essor de la région et le secteur de la construction, l'eau salée remonte donc encore plus loin avec là aussi de lourdes conséquences sur la production agricole.
Une prise de conscience au Vietnam de ces risques ?
Sur l'excès de pompage des eaux souterraines, le gouvernement a mis en place plusieurs mesures pour le limiter, mais elles ne sont pas toujours mises en œuvre ni efficaces. Quant aux extractions de sable, leur effet délétère n'a été découvert que trop récemment. Il n'y a donc rien pour les atténuer.
Mais de manière plus générale, c'est bien le modèle de développement économique de la région qui est à l'origine de ces transformations environnementales, transformations qui ne sont pas prises en compte dans les projets de développement actuels. On ne voit donc pas comment la situation pourrait s'arranger.
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