Questions d'environnement

Pourquoi Emmanuel Macron veut-il combattre le méthane?

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Le président français annonce une initiative au G7 pour lutter contre le deuxième gaz responsable du changement climatique, après le dioxyde de carbone. Plus réchauffant et moins longtemps.

Le méthane a un pouvoir de réchauffement 80 fois plus important que le CO2. (image d'illustration)
Le méthane a un pouvoir de réchauffement 80 fois plus important que le CO2. (image d'illustration) AP - Matthew Brown
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Il passe généralement sous les écrans radar, et pas seulement parce qu’il est inodore et incolore. Le méthane, puissant gaz à effet de serre, est un peu l’oublié de la lutte contre le réchauffement climatique. On parle beaucoup moins du CH4 (son petit nom scientifique) que du CO2. Le méthane est pourtant le deuxième gaz responsable de la crise climatique après le dioxyde de carbone. Ce qu’a voulu rappeler la semaine dernière, Emmanuel Macron lors du sommet climat organisé à New-York aux Nations-Unies. « Fixons des objectifs contraignants sur le méthane, a appelé le président français. La réduction du méthane est le chemin le plus rapide pour une baisse des émissions. Nous en ferons aussi une priorité du G7 que la France aura à présider l’année prochaine », à partir du 1er janvier 2026, pour un an.

Le méthane, sur un siècle, est un gaz 25 fois plus réchauffant que le CO2, et même 80 fois plus sur 20 ans, grâce à sa capacité à absorber certains rayonnements. Il garde plus de chaleur et d’énergie. « Heureusement pour nous, le méthane n’a pas une durée de vie illimitée, comme le CO2. Il n’a pas 150 ans de vie, on est plutôt sur une dizaine d’années. C’est pour cela qu’on s’intéresse énormément au méthane, parce qu’il peut disparaître rapidement », souligne le climatologue Thomas Lauvaux. En agissant sur le méthane, on peut très vite faire baisser de 0,1 ou 0,2 degré le réchauffement.

60% des émissions de méthane sont d'origine anthropique, humaine. L'agriculture produit du méthane (les vaches et leurs quatre estomacs, en rotant ; les rizières émettent aussi beaucoup de méthane). On trouve aussi du méthane dans les décharges. Et il y a bien sûr le secteur industriel, l'exploitation des énergies fossiles. Une pollution planétaire mise en lumière il y a quelques années grâce à un satellite européen et une société française, Kayrros. « Ce fut un moment assez incroyable, se souvient Antoine Rostand, le président de Kayrros. On a pu pour la première fois compter les grands émetteurs, les grosses pollutions dans le monde, et ce fut un choc, parce que tout le monde pensait qu’il n’y en avait qu’une ou deux par an. On s’est rendu compte qu’il y en avait mille par an. »

« On sait qui pollue »

Y a-t-il du méthane près de chez vous ? Une carte interactive permet de le découvrir, mais il faut plutôt habiter en Russie, en Chine ou au Turkménistan, là où se trouvent les plus grosses pollutions. Ces émissions de méthane sont bien souvent des fuites, de la négligence, « énormément la maintenance de sites pour réparer les pièces du matériel, pour des questions de sûreté aussi, précise Thomas Lauvaux, professeur à l'Université de Reims en Champagne, qui a participé à la première grande étude qui a quantifié cette pollution mondiale. Dans beaucoup d’endroits, on libère simplement le gaz qui va s’échapper dans l’atmosphère. Pendant très longtemps, comme c’est un gaz qui n’a pas d’odeur et pas de couleur, on a simplement dégazé vers le haut de l’atmosphère, et puis le gaz partait. En revanche, il y a des sources qui, elles, sont continues. Par exemple, on ventile les mines de charbon pour que les mineurs qui sont en bas n’aient pas d’intoxication au méthane [le fameux coup de grisou], et là, c'est un flux en continu qui libère une à deux tonnes par heure de méthane. »

Alors qu’une coalition internationale lancée en 2021, sans contrainte, n’a donné aucun résultat, il s’agirait d’imposer des sanctions aux pollueurs, des amendes… « Aucune industrie n’est capable de s’auto-réguler, cela n’existe pas, estime Antoine Rostand, le patron de Kayrros, qui salue l’initiative d’Emmanuel Macron au G7. C’est pour cela qu’il faut absolument l’intervention du politique. C’est donc très bien que la France prenne le leadership là-dessus. On sait qui pollue. Il faut mettre en place maintenant un système de responsabilisation et je pense que c’est un vrai sujet pour le G7. » Et ce sera peut-être le moyen d'obtenir enfin, et à court terme, un résultat tangible dans la lutte contre le changement climatique.

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