Dégâts climatiques: où en est le Fonds pertes et préjudices ?
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Le conseil d'administration du Fonds pertes et préjudice se réunit pour la première fois ce mardi 30 avril et jusqu'au jeudi 2 mai à Abou Dhabi. Une nouvelle étape de franchie pour ce dispositif entériné lors de la Cop28 de Dubaï. Retour sur son rôle et sur les prochaines étapes qui attendent ce fonds.

Ce Fonds pertes et préjudices a été créé pour compenser les dégâts irréversibles causés par le réchauffement climatique. Des fonds existent déjà, même s'ils sont insuffisants, pour aider certains pays à limiter le réchauffement climatique ou pour s'y adapter.
Les « pertes et préjudices », « c'est l'étape d’après », définit Fanny Petitbon, spécialiste climat à l’ONG Care-France. « Si l'on ne fait pas tout pour réduire nos émissions, on doit s’adapter et si l'on n’arrive pas à s’adapter, parce qu’on n'a pas suffisamment de moyens pour le faire, il y a des impacts irréversibles. » Cela peut être la submersion ou la salinisation des terres en raison de la montée des mers, par exemple.
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Ce fonds était réclamé de longue date par les pays les plus vulnérables au nom de la justice climatique. Ils sont souvent aux premières loges et pourtant moins responsables du réchauffement climatique.
Depuis la COP28, le conseil d'administration chargé de concrétiser ce fonds a été constitué non sans quelques difficultés.« Les pays en développement ont fourni les noms en temps et en heure. Mais cela n’a pas été le cas des pays développés qui se disputaient le nombre de places limitées au conseil d’administration », explique Fanny Petitbon, responsable de plaidoyer de l'ONG Care-France. Et de préciser : « il y a 26 sièges dont douze pour les pays développés. Finalement, il y a cette répartition avec sept sièges qui vont à l'Union européenne et cinq qui vont au ‘groupe de l'Ombrelle’ » qui est un groupe de négociations regroupant entre autres les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande ou encore la Suisse.
Pour le groupe des pays africains, siègent l'Afrique du Sud, la Zambie et l'Égypte. Le Bénin est l'un des deux représentants pour le groupe des pays les moins avancés.
Discussions « moins politiques »
Cette session de ce mardi 30 avril au jeudi 2 mai va « mettre en route la machine », résume la spécialiste du climat. Beaucoup de points de procédure devront être réglés et les discussions devraient changer de registre. « Normalement, elles sont censées être moins politiques, mais on verra comment ça se passe dans la réalité, résume Fanny Petitbon.
Car des questions importantes sont à l’ordre du jour. Les administrateurs ont été appelés à choisir les deux co-présidents. Selon une source au fait des négociations, les représentants de la France et de l'Afrique du Sud ont été élus. Le conseil devra aussi travailler sur le nom du fonds et établir les critères de sélection du futur pays hôte. Les Philippines, les Bahamas, la Barbade et Antigua-et-Barbuda auraient déjà manifesté leur intérêt pour l'accueillir, selon un observateur.
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Banque mondiale
Le conseil pourrait également donner des orientations à la Banque mondiale. Cette dernière est censée héberger temporairement le Fonds pertes et préjudices. Mais elle doit pour cela accepter une série de conditions, déroger à certaines de ses pratiques. Et elle n'a pas fini de statuer.
Par la suite, le conseil sera également en charge de définir les critères d'allocation des aides. On n'attend pas de réponse lors de cette session et c'est un sujet sensible. La décision n’a pas été prise avant l’annonce de la COP28, précisément pour éviter les blocages. « Certains pays voudraient que, puisque les ressources sont limitées », seuls « les pays les plus vulnérables », soient susceptibles de recevoir des financements aux titres des pertes et préjudices, détaille Lola Vallejo, conseillère climat au sein de l’Institut du développement durable et des relations internationales. « À contrario des pays à revenus intermédiaires insistent beaucoup sur le fait que tous les pays en développement doivent être éligibles. » Autres questions auxquelles ils devront répondre : « comment est-ce qu'on définit des événements ouvrant la voie à ces financements ? » énumère encore Lola Vallejo.
Nombre limité d'observateurs
En attendant, avant même l’ouverture de la première session, une polémique a émergé.« Un grand nombre de représentants de la société civile n’a pas pu participer à cette réunion », souligne Zoha Shawoo du Stockholm Environment Institute, « car seulement deux observateurs par grand groupe de travail ont été autorisés ». 340 ONG et autres associations, dont des organisations du Sénégal, du Mali et de RDC, le regrettent dans une lettre. Les règles au sujet des observateurs doivent précisément être définies lors de cette première réunion.
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