Questions d'environnement

Les pâturages, des terres fragiles qu'il faut préserver

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La Convention de l'ONU sur la désertification publie ce mardi 21 mai un rapport sur les pâturages. Prairies, steppes, savanes ou alpages, ces zones représentent 54 % de la surface terrestre et sont importantes à protéger. Pourtant, leur rôle est méconnu et les peuples qui en dépendent souvent marginalisés. Les pâturages et les éleveurs sont aujourd'hui menacés.

Des éleveurs dans l'État de Niger au Nigeria (Image d'illustration).
Des éleveurs dans l'État de Niger au Nigeria (Image d'illustration). © Arne Hoel/Banque mondiale
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La première menace qui pèse sur les pâturages est l’extension de l’agriculture, qui grignote les prairies et les savanes. Puis vient le changement climatique avec une pluviométrie changeante, des sécheresses aux inondations. Enfin vient l’urbanisation, l’extension des villes et des réseaux de communication sous la pression démographique.

En résulte une dégradation de ces vastes étendues herbeuses, souvent considérées comme des friches ou de potentielles terres arables que l’on peut aménager à sa guise, souvent sans prendre en compte les populations traditionnelles qui y vivent et en dépendent, et sans se rendre compte que ces aménagements détruisent en réalité des espaces précieux, mais oubliés des politiques publiques.

C’est ce que déplorent les experts de l'ONU dans le rapport publié ce mardi. « Il existe un foncier agricole, mais pas de foncier pastoral », note ainsi le Mauritanien Ibrahim Thiaw, secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification.

44 % du PIB du Mali

Les services que ces espaces rendent à l'homme et à la nature sont ainsi sous-estimés. En Afrique de l'Ouest par exemple, « les pâturages couvrent 2,9 millions de km². […] Les éleveurs nomades et transhumants représentent environ 13 % de la population » de la sous-région et les dizaines de millions de bœufs, de chameaux, de moutons et de chèvres de la zone rapporte beaucoup, selon ce rapport. Au total, d’après l'ONU, « la part de la production animale dans le PIB des pays du Sahel est en moyenne de 40 % » (elle varie beaucoup, de 5 % en Côte d’Ivoire à 44 % au Mali par exemple). « Les circuits traditionnels de commercialisation des produits d'origine animale génèrent par ailleurs des milliers d'emplois secondaires. Au Burkina Faso, ils ont été évalués à l'équivalent de 60 000 emplois à temps plein. »

Les pâturages sont aussi le lieu de vie et de passage d'espèces menacées et emblématiques, de l'éléphant au lion, des girafes, aux antilopes et aux zèbres... Ils constituent donc une réserve de biodiversité importante. Leur rôle pour lutter contre le changement climatique est également souligné par les chercheurs du GIEC. Les prairies sont capables, au même titre que les forêts, de stocker le carbone. « Jusqu'à 30 % du CO2 atmosphérique peut être emmagasiné » grâce aux plantes des pâturages, souligne Ibrahim Thiaw. Au niveau culturel, une langue sur quatre dans le monde est parlée dans ces zones.

Reconnaître et investir dans l'économie pastorale

L'ONU appelle donc les dirigeants à mieux prendre en compte les pâturages et à investir pour les protéger. Le secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification, rappelle « qu’un demi-milliard de personnes vivent dans ces zones » à l’échelle mondiale. « Il est très important que l’on tienne compte de leur économie, de manière à éviter qu’elles ne tombent dans la pauvreté. Il est assez incroyable que même dans les pays où l’économie pastorale domine, où même les leaders sont d’origine des zones où les gens pratiquent le pastoralisme, que cette question ne soit pas portée à l’attention des politiques publiques ! » s’insurge-t-il.

« Il est très important de reconnaître que ces zones de pâturage sont des secteurs important de l’économie, et qu’il faut investir dans cette économie rurale et pastorale », poursuit Ibrahim Thiaw. Avec des mesures adaptées, on pourrait même rêver à la résolution des conflits entre éleveurs et agriculteurs au Sahel et à un développement de l'économie dans ces zones...

Signe en tout cas de la volonté de l’ONU de mettre en avant le sujet, l’année 2026 a été désignée année internationale du pastoralisme et des pâturages. Il en sera également question lors de la COP dédiée à la désertification et à la dégradation des terres prévue en fin d'année en Arabie saoudite.

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