Quel rôle la COP-12 peut-elle jouer contre le crime organisé dans la défense de l'environnement ?
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La COP-12, la douzième conférence des parties, de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, se tient à Vienne du 14 au 18 octobre. À l’ordre du jour figurent entre autres deux résolutions sur les crimes qui portent atteinte à l’environnement. Une criminalité aux multiples facettes.

La liste est longue. Elle va du trafic d’espèces vivantes aux trafics de déchets. Il peut s’agir aussi d’exploitation de minerais comme l’orpaillage illégal. Une sorte de puzzle qui rapporte beaucoup d’argent aux auteurs des faits entre 110 et 280 milliards de dollars selon le Groupe d’action financière (Gafi).
L’un des défis clef de la communauté internationale face à ce puzzle, « c’est qu’il n’y a pas eu de définition commune » précise pour tous ces crimes, explique Ian Tennant, directeur de l’engagement multilatéral à l’Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée (Global initiative). Pour Legambiente, la liste établie par l’Union européenne dans sa directive de février 2024 pourrait être un point de départ : « c’est une bonne définition », juge Enrico Fontana, responsable de l’Observatoire environnement et légalité de l’ONG italienne de protection de la nature. « Elle comprend une liste des infractions pénales, parmi lesquelles le commerce illégal du bois, l’épuisement des ressources en eau, les violations graves de la législation européenne sur les substances chimiques et la pollution causée par les navires. Les nouvelles règles incluent également des infractions dites "qualifiées", telles que les incendies de forêt de grande ampleur ou une pollution généralisée de l’air, de l’eau et du sol, qui dégradent les écosystèmes et s’apparentent à un écocide, » peut-on lire sur le site du Parlement européen.
« Crimes graves »
Malgré le défi présenté par ces trafics transfrontaliers, cette convention sur la criminalité transnationale organisée se saisit de plus en plus du dossier environnemental. C’est la troisième fois d’affilée que la Conférence des parties aborde ces questions. Cette année, deux projets de résolution sont sur la table, ils incluent une meilleure reconnaissance du lien entre crime organisé et atteintes à l’environnement. Ils soulignent qu’il ne s’agit plus d’une simple menace émergente et que la lutte contre ces crimes relève d’une responsabilité partagée des États. Également en discussion cette semaine, des recommandations d’ordre pratiques. « Il y a des recommandations telles que celle de former les juges, les procureurs, les forces de l’ordre, aux spécificités de ces différents crimes », explique Riikka Puttonen, directrice de programme à l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime.
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« Dans les projets de résolution, il y a aussi une recommandation pour que les pays reconnaissent les crimes qui affectent l’environnement comme des ‘crimes graves’. Il y en a une autre pour que les pays considèrent les crimes qui affectent l’environnement comme des infractions principales aux fins du blanchiment d’argent », liste encore Riika Puttonen.
L’une des possibles solutions suggérées dans le projet déposé par la France, le Brésil et le Pérou, c’est aussi la mise en place d’un groupe intergouvernemental d’experts.
Rôle de la société civile
Ce brouillon rend, par ailleurs, hommage à la société civile. Ce n’est pas anodin vu le lourd tribut que paient les défenseurs de l’environnement.
« Ce que nous voyons dans le projet est une attitude positive envers l’inclusion des ONG, de la société civile et d’autres parties prenantes », salue Ian Tennant, de Global Initiative. Il restera particulièrement attentif à cet aspect des négociations : « notre expérience de ces négociations à Vienne est que parfois, ces dernières peuvent être contestées par les gouvernements qui ne veulent pas que la société civile soit impliquée. Nous espérons donc que ces éléments resteront dans le projet lors des négociations. »
Car ces textes pourront évoluer au cours de la semaine.
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Question de suivi
Quant à leur efficacité, les formules utilisées sont plus de l'ordre de l'incitation que de la contrainte. Par ailleurs, si « presque tous les États membres de l’ONU ont signé la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée », l’un des principaux problèmes aux yeux de Global initiative, c'est le manque de vérification de la mise en œuvre de ces résolutions. Legambiente souhaiterait donc qu’un pas supplémentaire soit sauté. « Les conditions sont réunies pour envisager sérieusement la création d’une convention internationale contre la criminalité environnementale », estime Enrico Fontana.
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