Questions d'environnement

Qui sont ces poussins qu'on assassine?

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L'association de défense des droits des animaux L214 vient de publier de nouvelles vidéos sur la maltraitance animale dans l'élevage en France : des poussins sont éliminés vivants dans une broyeuse en raison de leur genre. Une pratique pourtant interdite pour les poules pondeuses depuis 2023.

L214 révèle une enquête sur le broyage des poussins et des pintadeaux dans un couvoir situé à La Boissière-en-Gâtine dans les Deux-Sèvres.
L214 révèle une enquête sur le broyage des poussins et des pintadeaux dans un couvoir situé à La Boissière-en-Gâtine dans les Deux-Sèvres. © animaux.l214.com/commons creatives
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Ils ne demandaient rien, ces petits poussins jaunes, des poussins de poules, nés dans un couvoir, qu’on envoie ensuite dans des élevages pour finir plus tard sous forme de cuisse ou de nugget. La scène se passe en France, dans le département des Deux-Sèvres (Ouest), dans une véritable usine où un million de poussins naissent chaque semaine – et beaucoup y meurent aussi.

Dans une vidéo aux images violentes publiées par l'Association de défense des animaux d’élevage L214, on entend leurs petits cris, juste avant leur mort dans une broyeuse. On peut aussi voir un employé jeter des poussins comme s’il lançait une balle, et les écraser vivants à coups de balai. Dernière séquence éloquente : un poussin, tout seul, tente de remonter le tapis roulant à contre-sens, pour échapper à la broyeuse.

« Maltraitance systémique »

La broyeuse, c’est ce qui attend les poussins qui n’ont pas le bon genre. Pour les poules pondeuses, la pratique a perduré jusqu'en 2022, jusqu'à son interdiction : on broyait les mâles parce qu'ils ne pondent pas d'œuf. Depuis 2023, on jette les œufs avant la naissance, en identifiant le sexe dans la coquille – c’est l'ovosexage.

Mais dans l'élevage pour la viande, on continue comme avant, selon L214. « Chez les restaurants McDonald’s, ils utilisent généralement des poulets mâles, qui vont avoir un poids d’abattage de 2 ou 2,5 kg, pour arranger les abattoirs pour les découpes. Pour les supermarchés, ils préfèrent avoir des femelles pour avoir des cuisses ou des ailes dans les barquettes. Dans ce couvoir, selon les bons de livraisons, 100 000 poussins femelles ont été livrés dans des élevages, et 30 000 poussins mâles ont été livrés dans d’autres élevages. On a une différence de 70 000 poussins qui ont été broyés ce jour-là », affirme Sébastien Arsac, co-fondateur de L214. La filière d’élevage répond de son côté qu'on n'élimine que les poussins malformés, ce qui ne saute pas aux yeux dans la vidéo.

Cette nouvelle révélation de l’association L214 soulève une nouvelle fois, au-delà des poussins, les problèmes que peut poser l’élevage de viande. En France, 80 % des animaux consommés sont issus d'élevages industriels, et « c'est de la maltraitance systémique », selon Sébastien Arsac : « Pour les cochons, on leur coupe les dents, la queue, on fait de la castration, parce que c’est de l’élevage intensif. On entasse des poulets à plus de 22 sur 1 m², des lapins sur la moitié d’une feuille A4. Pas une seule personne aujourd’hui en France n’est prête à dire que cela correspond aux conditions conformes à leur bien-être. »

À lire aussiFrance: le broyage des poussins mâles désormais prohibé dans la filière des pondeuses

L'UE reconnaît les animaux comme des êtres sensibles depuis 2007

Les animaux sont-ils des êtres sensibles ? Oui, même si vous posez directement la question à un animal, il n’est pas sûr qu'il vous réponde. Mais la science l'a prouvé, et il y a eu de gros progrès ces dernières années : derrière chaque animal, il y a un cœur qui bat et il y a aussi un cerveau. « Énormément d’expériences aujourd’hui montrent la capacité des animaux à ressentir la douleur et la souffrance, mais aussi d’avoir de la métacognition, d’avoir une conscience, d’avoir des relations sociales très poussées, une communication. Ce sont quelques choses qui devraient vraiment changer notre responsabilité et notre façon de partager la planète avec eux », conclut Sébastien Arsac.

Un article du traité européen de Lisbonne, signé en 2007, stipule que les animaux sont des êtres sensibles. À Bruxelles, il y a un commissaire au bien-être animal. L214 vient d'ailleurs de l'alerter sur cette nouvelle affaire, pour que notre goût pour les animaux morts soit un peu plus éthique, pour que notre humanité ne disparaisse pas complètement au fond de notre assiette. Rien qu'en France, 700 millions de poulets sont abattus chaque année.

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