Questions d'environnement

Pourquoi le gaspillage alimentaire est-il un pillage planétaire?

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Un milliard de repas sont jetés chaque jour dans le monde. Un scandale humanitaire et environnemental.

L'équivalent d’un milliard de repas est jeté dans le monde chaque jour.
L'équivalent d’un milliard de repas est jeté dans le monde chaque jour. © AP - Natacha Pisarenko
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Le chiffre choc est rappelé chaque année par les Nations unies à l’occasion de la Journée internationale de sensibilisation contre aux pertes et gaspillages de nourriture, le 29 septembre : l’équivalent d’un milliard de repas est jeté dans le monde chaque jour. Dans le monde, parce que ce n’est pas qu’un problème de riches. On jette beaucoup, et toujours trop, dans les pays développés, mais les plus pauvres ne sont pas épargnés par le phénomène. Entre les pays riches et les pays les plus pauvres, il y a seulement 7 kilos de déchets alimentaires de différence. Résultat : en 2022, chaque habitant de la planète a produit en moyenne 132 kilos de déchets alimentaires. Autre chiffre pour évaluer l'ampleur du phénomène : 20% de la production alimentaire mondiale part chaque année à la poubelle.

Ce qu’on gaspille, ce sont évidemment d'abord les produits frais, en particulier les fruits et légumes. En France, au pays de la baguette, on se distingue, et c'est le pain qu'on jette le plus. Tout le monde jette, du producteur au consommateur. En ce qui concerne les professionnels de l’agro-alimentaire, c'est ce qu'on appelle les pertes alimentaires, entre la récolte et l'expédition. Dans le monde, plus de 13% de la production de fruits et légumes est ainsi perdue. Il y a d'abord les aléas climatiques et météorologiques, comme des gelées tardives en France, dans le département de la Loire, en 2021, qui avaient provoqué la perte de 90% de la récolte des fruits à noyau. Il y a aussi les maladies, les ravageurs, et l’agriculteur peut parfois perdre un tiers d'une récolte.

Fruits et légumes « moches »

Dans ces cas, on n'y peut pas grand-chose. En revanche, il y a un phénomène tout à fait évitable : quand les producteurs sacrifient des fruits ou des légumes qui ne correspondent pas aux canons de la beauté végétale : pas les bonnes couleurs, pas la bonne forme, pas le bon calibre... C'est ce qu'on a appelé en France les fruits et légumes « moches ». Des opérations de vente à moindre à prix dans les supermarchés se sont soldées par un échec. Pour le consommateur, seul ce qui est beau est bon – une vue de l'esprit qui a la dent dure. Il arrive aussi que les agriculteurs laissent pourrir les fruits sur la branche, quand les prix s'effondrent, ce qui arrive quand l'offre devient soudain trop importante et qu’il n'est pas rentable de les ramasser. Et puis il y a le transport : certains fruits sont fragiles et sont jetés à l'arrivée. Alors, pour limiter la casse, vous trouvez souvent des fruits encore verts, bien durs, sans saveur, privés de soleil bien trop tôt.

Du champs à la poubelle

Après les pertes alimentaires, il y a le gaspillage. C'est par exemple, la vielle pêche que vous avez laissé pourrir au fond du frigo (à votre décharge, il faut dire qu'elle était cachée par un vieux pot de crème fraîche à moitié consommé). Au pire, on peut la valoriser, et la mettre au compost, pour nourrir la terre et les futures récoltes. Un moindre mal. Les occasions de jeter de la nourriture sont multiples : parce qu'on achète trop quand on fait ses courses ; parce qu'on ne finit pas son assiette, à la maison, au restaurant, à la cantine....

Au-delà du coût économique, 1 000 milliards de dollars chaque année, au-delà du scandale humanitaire, quand 800 millions de personnes dans le monde ne mangent pas à leur faim, le gaspillage a aussi un coût environnemental. Un quart des surfaces cultivées dans le monde servent à produire des aliments qui finiront à la poubelle. Il y a toute l'eau qu'on utilise pour faire pousser ces fruits, ces légumes ou ces céréales qu'on ne mange pas ; la nourriture animale qu'on a utilisée pour produire un steak ou une cuisse de poulet qui ne sera jamais consommé. Le gaspillage alimentaire est un pillage planétaire, qui représente 8 à 10% des émissions de gaz à effet de serre, cinq fois plus que le transport aérien. Le troisième plus grand contributeur à la crise climatique, après les États-Unis et la Chine, c'est le gaspillage alimentaire.

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