Reportage Afrique

Ouganda: les anciens kidnappés des ADF se rappellent [3/3]

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Suite et fin de notre série en Ouganda, où le massacre attribué au groupe armé des ADF, la nuit du 16 juin, dans une école de la ville de Mpondwe, a réveillé de vieux souvenirs. 43 morts et des élèves enlevés et emmenés en RDC par les rebelles, toujours recherchés par les forces de l'ordre. Dans cette région aux alentours du Rwenzori, où les ADF menaient de nombreuses opérations dans les années 1990, certains survivants des attaques de l'époque racontent.

Ramadhan Byarugaba, un Ougandais qui avait été enlevé par les ADF en 1999.
Ramadhan Byarugaba, un Ougandais qui avait été enlevé par les ADF en 1999. © ISAAC KASAMANI / AFP
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De notre envoyée spéciale à Rwenzori,

Au petit matin, après l’attaque menée par de présumés ADF à Mpondwe, Biira Medress était en train de se préparer quand son frère l’a appelé pour lui apprendre la nouvelle. « Il m’a dit, Medress, est-ce que tu sais ce qu’il s’est passé ? Je lui ai dit que non, puis il m’a raconté qu’ils avaient tués des élèves à la machette. Alors je lui ai dit que j’étais en train de préparer ma fille pour l’école, il m’a demandé de ne pas prendre le risque, de rester à l’intérieur et de fermer les portes. Depuis, je n’ai pas pu trouver le sommeil, parce que je pensais à ce qui m’étais arrivée quand j’ai été enlevée », explique-t-elle.

Kidnappée en 1999, quand elle était encore adolescente, la mère de famille a passé plusieurs mois à travailler comme domestique dans un camp du groupe armé avant de s’échapper. Comme elle, à l’époque, beaucoup d’enfants ougandais de la région du Rwenzori étaient enlevés par les ADF. C’était le cas d’Edson Bomenze. « Ils avaient des uniformes comme ceux de l’armée. Ils m’ont entouré et m’ont emmené au Congo. Les ADF voulaient que nous, les civils, portions leurs bagages pour qu’ils puissent marcher… Ça a duré jusqu’à ce que les UPDF (l’armée ougandaise) nous retrouvent. Nous sommes quelques-uns à avoir survécu », raconte-t-il.

Une région appauvrie par les conflits

Le commerçant de 53 ans a passé trois semaines en 1999 parmi les ADF. Comme beaucoup d’anciens kidnappés, l’attaque du 16 juin dernier avec un bilan de 43 morts l’a surpris par la violence des assaillants. « Les ADF d’avant attaquaient surtout les casernes militaires, cette fois c’est les institutions civiles et les populations. S’ils disent vouloir combattre le gouvernement, ils devraient attaquer des combattants, pas des civils, des enfants dans une école », dit-il.

La région ougandaise du Rwenzori a jusqu’au début des années 2000 été marquée par la présence de plusieurs groupes armés, dont les ADF et les NALU avant eux. Des groupes qui recrutaient à l’époque largement dans cette région éloignée de la capitale, appauvrie par les conflits. « Toutes ces choses ont amené une grande pauvreté. Nos jeunes garçons n’ont rien du tout, ils n’ont pas de travail, ils peuvent facilement être recrutés par ces rebelles. Donc nous avons peur que si ces choses continuent, elles amèneront notre jeunesse dans la mauvaise direction », indique l’ancien Premier ministre du royaume du Rwenzururu, Gad Mbayahi.

Le 30 juin, deux semaines après le massacre, le Royaume-Uni a mis à jour ses conseils de sécurité en Ouganda, affirmant que des « terroristes étaient très susceptibles d’essayer de mener des attaques » dans le pays.

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